JPM - Films vus - Notules -  Décembre 2011

Notules - Décembre 2011

 

Plus courtes que les critiques, les notules traitent d’un ou plusieurs films, ou de sujets d’actualité en rapport avec le cinéma. Jusqu’en septembre 2004, elles provenaient de divers forums aujourd’hui disparus. Par la suite, elles s’en affranchissent et sont rédigées directement ici.

Œuvres citées (en italiques, autres que des films) : JigLe stratègeMoneyballTime outIn timeDernière séanceThierry la Fronde – Reservoir dogs – Le boucher – Psychose – French Cancan – Les immortelsImmortals – L’étrange histoire de Benjamin Button – Oh my God !Hysteria – La mélodie du bonheur – West side story – The sound of music – Blanche-Neige – Vertigo – Les dix commandements (1956) – Les dix commandements (1923) – The squaw man – L’homme qui en savait trop (1956) – L’homme qui en savait trop (1934) – Shawn of the dead – Avatar – Les moissons du ciel – Le dictateur – Les chaussons rouges – ContracorrienteLe voyage extraordinaire – L’enfer d’Henri-Georges Clouzot – Le voyage dans la Lune – Blade runner – Shame – Drive – New York New YorkLe voleur de BagdadThe thief of Bagdad – Elephant boy – Alerte aux Indes – Le livre de la jungle – Les mille et une nuits – Le narcisse noir – Le trésor du Bengale – Les mystères d’Angkor – Les  pas du tigre – Le Havre – Welcome – Hugo CabretHugo – Taxi driver – Une journée particulière – HollywooLet me people go ! – Les dix commandements – La délicatesseBruegel, le moulin et la croixMlyn i krzyzThe mill and the crossLe portement de croixRoméo et Juliette

Personnes citées : Sue Bourne – Bennett Miller – Brad Pitt – Jonah Hill – Philip Seymour Hoffman – Andrew Niccol – Cillian Murphy – Laurent Achard Eddy Mitchell – Jean-Claude Drouot – Claude Chabrol – Anne Fontaine – Alfred Hitchcock – Jean Renoir – Tarsem Singh – Henry Cavill – Freida Pinto – Tanya Wexler – Rupert Everett – Robert Wise – Natalie Portman – Hugh Jackman – Stan Laurel – Oliver Hardy – Cecil B. DeMille – Alfred Hitchcock – Orson Welles – Serguei Mikhailovich Eisenstein – Luchino Visconti – Gus Van Sant – Terrence Malick – Michael Powell – Emeric Pressburger – Javier Fuentes-León – Éric Lange – Serge Bromberg – Georges Méliès – Tom Burton – Thomas Edison – Jules Verne – Herbert George Wells – Steve McQueen – Carey Mulligan – Liza Minelli – Ludwig Berger – Michael Powell – Tim Whelan – Aki Kaurismäki – Philippe Lioret – Martin Scorsese – Ettore Scola – Thomas Edison – Frédéric Berthe – Pascal Serieis – Florence Foresti – Jamel Debbouze – Ben Wise – Mikael Buch – Christophe Honoré – David Foenkinos – Stéphane Foenkinos – Audrey Tautou – Pieter Bruegel l’Ancien – Lech Majewski – Michael York

Jig

Vendredi 2 décembre 2011

Réalisé par Sue Bourne

Sorti au Canada (Hot Docs International Documentary Festival) le 1er mai 2011

Sorti en France le 30 novembre 2011

La danse irlandaise est peu connue. On n’y utilise que ses jambes et ses pieds, les bras chez les solistes restant collés le long du corps. Peu attrayante pour le spectateur, qui n’y retrouve pas les sensations euphorisantes que font naître, par exemple, les numéros d’un Fred Astaire, elle possède néanmoins assez d’adeptes pour avoir son championnat du monde annuel, et celui montré dans ce documentaire se tient en Écosse, à Glasgow, où il réunit six mille danseurs internationaux, tous très jeunes.

Nous assistons surtout à la présentation de quatre des finalistes, trois garçons de dix, seize et dix-sept ans, et une fille de sept ans, mais leurs répétitions sont réduites à la portion congrue, ce qui rend le film assez insatisfaisant. La musique, excessivement sentimentale, incessante, et le palmarès, avec son très long décompte des points digne de l’Eurovision, sont lassants.

Au verdict, donc, un garçon sri-lankais de dix-sept ans, adopté en Grande-Bretagne, qui n’a dans la vie aucune passion hormis cette danse, et qui espérait finir dans les cinq premiers, arrive dixième : son avenir est bien compromis. Puis le garçon de seize ans, très bien préparé, avec une technique imparable, et qui sait devoir gagner, gagne en effet. Mais le garçon de dix ans, qui dort encore avec ses ours en peluche, termine premier de sa catégorie et n’en fait pas tout un plat. La petite fille de sept ans, elle, ponctue par un hurlement strident l’annonce qu’elle est deuxième.

C’est un peu mince, et le film ne convertira pas les novices, je le crains.

En bref : à voir à la rigueur.Haut de la page

Le stratège

Lundi 5 décembre 2011

Réalisé par Bennett Miller

Titre original : Moneyball

Sorti au Canada (Festival de Toronto) le 9 septembre 2011

Sorti en France le 16 novembre 2011

Ce n’est pas une très bonne idée que de distribuer ce film en France, où le baseball et ses vedettes sont inconnus, et où ses règles restent obscures. On voit assez peu les matches, mais surtout les négociations en coulisses, et principalement par téléphone, pour constituer une équipe avec un budget serré.

L’intérêt est donc plutôt réduit, et n’est soutenu que par les dialogues, dit par deux vedettes, dont le producteur Brad Pitt, sans cesse à l’écran, et surtout par un acteur étonnant, Jonah Hill, connu surtout pour des séries télévisées plus quelques navets dont il vaut mieux ne rien dire. Là, il est épatant. Il est sans doute parti pour faire une carrière dans le genre de celle de Philip Seymour Hoffman, lequel tient ici un rôle très secondaire.

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Time out

Mardi 6 décembre 2011

Réalisé par Andrew Niccol

Titre original : In time

Sorti à Singapour le 26 octobre 2011

Sorti en France le 23 novembre 2011

Avouons que, pour titrer Time out (en France seulement, nos distributeurs à nous ont du génie) un film dont le véritable titre est In time, il faut avoir un fichu esprit de contradiction. Au Québec, où l’on traduit les titres littéralement, on l’a sorti sous le titre En temps, ce qui est beaucoup plus marrant, mais passons...

L’idée, due au réalisateur-scénariste, n’est pas mauvaise du tout : dans le Los Angeles à venir, l’argent n’a plus cours, ce qui est surprenant aux États-Unis. La nouvelle monnaie, c’est le temps ! À la naissance, histoire de limiter la surpopulation, vous sont attribuées vingt-cinq années à vivre, puis vous mourez subitement si vous n’avez pas gagné de l’argent, pardon : du temps, en travaillant ou par tout autre moyen. Il y a toujours des riches, qui accumulent à la banque des années, voire des siècles ; des pauvres, qui gardent l’œil sur le compteur de temps tatoué sur leur avant-bras ; des voleurs de temps ; et bien sûr une police du temps. Ceux qui ont du temps en réserve gardent leur apparence : vingt-cinq ans, même s’ils en ont vécu le triple. Pratique, plus de vieillards nulle part.

Toutes les astuces de dialogue autorisées par ce point de départ sont au rendez-vous, du genre : « Quoi ! Quatre minutes pour un café ? Hier, il en coûtait trois ! – Que voulez-vous, tout augmente ». Ou encore, cette proposition d’une prostituée à son client potentiel : « Pour dix minutes (durée de la prestation), c’est deux heures (prix du service) »...

L’ennui, c’est que, de cette bonne idée, on ne fait pas grand-chose, et le scénario est à base de Héros Qui Se Dresse Contre Le Système, acccompagné de la Fille Qui S’Est Révoltée Contre Son Père Banquier, et tous deux passent leur temps à fuir devant les Méchants et le Policier Incorruptible – joué par le glaçant Cillian Murphy. Résultat, des cascades, des fusillades, et des poursuites, en voiture et à pied (vais-je atteindre la borne de recharge de mon temps avant que soient écoulées les trente secondes qui me restent à vivre ?). Tout cela noyé sous une musique fracassante de blockbuster comme on en subit cinquante par an.

Si bien que le spectateur finit par le trouver long, le temps !

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Dernière séance

Mercredi 7 décembre 2011

Réalisé par Laurent Achard

Sorti en Suisse (Festival de Locarno) le 9 août 2011

Sorti en France le 7 décembre 2011

Si ce titre évoque effectivement la fermeture d’un cinéma, n’espérez pas un hommage à Eddy Mitchell ! En effet, c’est une histoire criminelle à base de psychanalyse : Sylvain, 31 ans et qui ressemble un peu à Jean-Claude Drouot dans Thierry la Fronde, est projectionniste-caissier-programmateur-homme à tout faire dans un petit cinéma, où il vit au sous-sol, et qui va fermer pour cause de non-rentabilité.

Mais Sylvain a une marotte : il agresse des femmes portant des boucles d’oreilles, les tue, leur coupe une oreille (il a dû voir Reservoir dogs) et va ensuite épingler son trophée sur les photos des vedettes féminines qui ornent les murs de son réduit. On saura plus tard, via un flashback, le pourquoi de ces crimes : enfant, sa mère, qui voulait en faire une vedette de cinéma, l’obligeait à répéter une scène en vue d’une audition, or il était question dans la scène de boucles d’oreille qu’un amant mystérieux lui avait offertes !

On voit la bêtise (ou la naïveté, pour être indulgent) du propos. À la fin, plagiant lui aussi Le boucher de Chabrol (Anne Fontaine fait des émules), le réalisateur montre son personnage menaçant d’un couteau la fille dont il est tombé amoureux, mais finalement il préfère se l’enfoncer dans l’abdomen ! On a aussi, simplement parce qu’il y a une mère dans l’histoire, comparé ce film au Psychose d’Hitchcock... Mais quand donc les réalisateurs de cinéma comprendront-ils que les histoires basées sur la psychanalyse sont vouées au ridicule ?

Dommage, le film est techniquement réussi, rend un bel hommage au French Cancan de Jean Renoir, mais il n’avance guère et finit par s’égarer dans le bizarre de pacotille.

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Les immortels

Vendredi 9 décembre 2011

Réalisé par Tarsem Singh

Titre original : Immortals

Sorti en Croatie, Grèce, Hongrie, Israël, Russie, Slovénie, au Liban et aux Pays-Bas le 10 novembre 2011

Sorti en France le 23 novembre 2011

Le réalisateur, qui est indien mais travaille aux États-Unis, avait dirigé la deuxième équipe pour L’étrange histoire de Benjamin Button. De toute évidence, il n’est intéressé que par l’aspect visuel de ses films, entièrement composé à l’ordinateur après tournage. Mais, pour le scénario qui est confondant de bêtise, il s’en remet à d’autres, deux Grecs pas très ferrés sur la mythologie de leur pays d’origine : on a ainsi le plaisir de voir Zeus tuer l’un de ses fils, pour être intervenu en faveur des humains ! Si les dieux de l’Olympe ne sont plus immortels, c’est vraiment la fin des haricots...

Le MacGuffin de l’histoire est l’arc d’Épire, une arme bien pratique, car elle possède une puissance effroyable, et surtout, se recharge toute seule ! Dommage, Henry Cavill en Thésée a du charisme, et Freida Pinto, qui joue Phèdre, est bien jolie. Mais tout ce carnage finit par être fatigant, et la musique en rajoute beaucoup.

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Progrès de l’humanisme

Lundi 13 dcembre 2011

C’est merveilleux de voir comment le public évolue ! Il y a bientôt dix ans, j’avais écrit ici même une notule intitulée Humanisme, parce que j’avais été énervé par la popularité de films comme Rain man, Forrest Gump ou Le cercle des poètes disparus, qui prétendaient nous donner des leçons et nous enseigner à faire fonctionner notre cœur.

Peu de choses ont changé en dix ans. À un détail près : aujourd’hui, les gens crèvent de trouille, et veulent donc être rassurés. D’où l’abondance de films qui nous disent en substance : ne craignez rien, quelqu’un va débarquer pour vous sauver.

Et c’est ainsi qu’en moins d’une année, on a pu voir un roi en exercice, mais bègue, accepter de se faire appeler « Bertie » par un faux médecin, qui parvenait à gagner son amitié en le guérissant de son bégaiement – on ne sait du reste pas comment ; un couple dont le bébé était atteint d’une tumeur au cerveau et n’ayant qu’une chance sur dix de guérir, mais qui guérissait néanmoins – on ne sait du reste pas comment ; un acteur, vedette du cinéma muet, mis au chômage quand le cinéma est devenu parlant, mais dont la carrière est relancée grâce à une ancienne figurante, devenue vedette parce qu’il l’avait aidée lors de ses débuts ; et un jeune homme noir, inculte, venu de la banlieue et sortant de prison, qui devenait l’ami d’un milliardaire cultivé mais cloué dans un fauteuil roulant – mise au goût du jour de la fable sur l’aveugle et le paralytique.

Trois de ces histoires (à vous de déterminer lesquelles, la quatrième est une fantaisie assumée) n’ont pas la moindre crédibilité, le moindre intérêt cinématographique, mais, comme presque chaque fois on colle au générique le récurrent carton « Basé sur des faits réels », il est interdit d’émettre le moindre doute, à la fois sur l’histoire et sur les intentions de ceux qui l’ont filmée. L’esprit critique, De profundis.

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Oh my God !

Mercredi 14 décembre 2011

Réalisé par Tanya Wexler

Titre original : Hysteria

Sorti au Canada (Festival de Toronto), le 15 septembre 2011

Sorti en France le 14 décembre 2011

Une fois de plus, les distributeurs français se couvrent de gloire, avec ce faux titre anglais à consonance grivoise, puisque le véritable titre fait seulement référence à une pseudo-maladie, l’hystérie, qui ne frappait que les femmes, croyait-on. Nous suivons donc l’histoire d’un jeune médecin, qui serait à l’origine de l’invention du vibromasseur, providence des femmes esseulées, mais pas d’elles seules !

C’est drôle, plein de fantaisie, pas du tout vulgaire, pas dans les images en tout cas, et bien moins grivois que le titre réservé au public de France voudrait le suggérer. Bref, c’est très britannique, et l’on frémit en imaginant ce qu’un Français aurait fait de ce sujet !

Signalons, dans un rôle secondaire, la présence de Rupert Everett, presque méconnaissable et qui, pour une fois, ne joue pas l’homo de service.

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Les remakes

Jeudi 15 décembre 2011

Entendu aujourd’hui sur France Inter une gourde qui souhaitait qu’on fasse un remake de La mélodie du bonheur, sous le prétexte que la version scénique de cette comédie musicale passe en ce moment au théâtre du Châtelet. Très mauvaise idée ! Ce film de Robert Wise, sorti en 1965, quatre ans après son West side story et sous le titre The sound of music, est presque parfait, donc n’a aucun besoin d’être refait. Je vois ça d’ici, au cas où un producteur imbécile prendrait au mot cette idée : on ferait le film en 3D pour que les montagnes se voient mieux, Salzbourg serait reconstituée en numérique, et Natalie Portman jouerait le rôle de la religieuse qui devient la mère adoptive des sept enfants, dont Hugh Jackman serait le père.

Mais, d’une manière générale, je suis hostile aux remakes. Pas par principe réac, mais pour deux raisons.

D’abord, si on éprouve l’envie de refaire un film, c’est parce que l’original a eu du succès ou parce qu’il était bon, voire les deux. Mais alors, à quoi sert la copie ? Autant ressortir la première version, au besoin en remettant à neuf le négatif, comme on l’a fait pour Blanche-Neige, Vertigo ou les films de Laurel et Hardy. Ce sera plus satisfaisant et ça coûtera moins cher.

Ensuite, parce que, chaque fois qu’on a refait un film, la nouvelle version s’est avérée catastrophique, et le public l’a boudée ; je vous épargne les exemples, multiples. En réalité, un remake est concevable si et seulement si le réalisateur de la première version se charge lui-même de ce travail, parce que précédemment il n’était pas satisfait du résultat. À ma connaissance, ce n’est arrivé que deux fois : en 1956, quand Cecil B. DeMille a refait Les dix commandements (déjà réalisé, en 1923, en version muette, et de manière très différente d’ailleurs, car ce premier film était construit bien autrement, avec une seconde partie contemporaine se passant  à San Francisco. Et il a tourné trois fois son premier film, The squaw man) ; et, la même année comme par hasard, quand Hitchcock a refait L’homme qui en savait trop, car il estimait pouvoir faire mieux que sa version en noir et blanc de 1934. Et là, évidemment, le second film était bien meilleur que le premier.

Dans tous les autres cas, on n’a que du plagiat ou du pillage de scénario.

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Les « meilleurs » films

Vendredi 16 décembre 2011

Allociné est la base de données du cinéma la plus importante en France, et j’ai eu l’idée d’aller consulter le classement, chez eux, des meilleurs films, selon la presse et les spectateurs. Allociné donne une liste de... 250 films. Et le résultat est saignant.

D’abord, aucune trace de ces ringards que sont Alfred Hitchcock, Orson Welles, S.M. Eisenstein ou Luchino Viconti. Mais Gus Van Sant est cité plusieurs fois. On a oublié Dany-Boon.

Et puis, surprise, Avatar n’arrive qu’au rang 205. Moi qui croyais que c’était le plus grand chef-d’œuvre depuis l’invention du cinéma, je suis déçu. Stupeur, c’est un film de Terrence Malick qui arrive en tête des meilleurs films de tous les temps, Les moissons du ciel, suivi par Le dictateur de Chaplin et Les chaussons rouges, de Michael Powell et Emeric Pressburger.

Enfin, manifestement, le classement privilégie les films qui sont sortis récemment.

Vu que Noël approche et que c’est donc la semaine où tout le monde devient bon et compatissant, je ne ferai aucun commentaire.

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Contracorriente

Vendredi 16 décembre 2011

Réalisé par Javier Fuentes-León

Sorti en Espagne (Festival de San Sebastián), le 23 septembre 2009

Sortie en France le 23 novembre 2011

Dans ce village péruvien de pêcheurs, la coutume est d’immerger les morts dans l’océan pour leur assurer la paix. Et les préjugés sont tenaces. Ainsi, Miguel, marié, qui aime sa femme Mariela et va être père bientôt, ne peut révéler qu’il aime aussi un homme, Santiago, un beau peintre figuratif qui, lui, ne cache pas son homosexualité ; il n’est d’ailleurs pas originaire du coin. Mais Santiago meurt. Or son fantôme apparaît chaque fois que Miguel pense à lui et surtout nie son lien passé avec lui. Cependant, tout se sait, et Mariela l’abandonne pour partir avec son fils enfin né. Comme il n’a plus rien à perdre, Miguel réclame alors le corps de Santiago à sa famille et lui donne la sépulture admise : il l’immerge dans l’océan.

Le film, pas toujours très clair, est beau et réalisé de manière très classique. Il décrit fort bien l’intolérance villageoise, et doit beaucoup à ses deux interprètes masculins.

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Le voyage extraordinaire

Lundi 18 décembre 2001

Réalisé par Éric Lange et Serge Bromberg

Sortie en France le 14 décembre 2011

Serge Bromberg est producteur et réalisateur de documentaires, le précédent sorti étant L’enfer d’Henri-Georges Clouzot, dont j’ai parlé ici en 2009. Dans ce film, il retrace un évènement dont il a joué l’un des rôles principaux : la redécouverte et la restauration de la version en couleurs du film de Georges Méliès, Le voyage dans la Lune, court métrage de quatorze minutes – à raison de seize images par seconde comme c’était le cas au début du muet –, datant de 1902.

Dans son studio de Montreuil, le premier construit pour le cinéma, Méliès avait fabriqué tous ses films – des fictions drôlatiques bourrées de trucages inventés par lui – en noir et blanc, évidemment muets. Mais Le voyage dans la Lune avait été plus tard colorié à la main, par deux cents coloristes de chez Pathé : environ 14 000 images ainsi traitées ! Or il n’existait aucune copie de ce film en couleurs, jusqu’à ce qu’on en retrouve une dans une cinémathèque de Barcelone et qu’elle soit échangée contre un film espagnol qui se trouvait en France. Hélas, le temps avait fait que la pellicule n’était plus qu’un amas compact, impossible à dérouler... jusqu’à ce qu’on s’aperçoive que seuls les bords, là où se trouvent les perforations, étaient collés. Centimètre par centimètre (quatorze minutes, c’est alors 257,56 mètres de film), on réussit à décoller la pellicule, mais les images se craquelaient et se déchiraient très rapidement.

Puisque le support d’origine était voué à s’autodétruire lui-même peu à peu, il s’imposait de numériser toutes les images – ou parfois des fragments d’images. Mais les scanners de l’époque ne faisaient pas de miracles. On attendit une dizaine d’années, jusqu’à la mise au point d’un scanner spécial, baptisé Sacha, très supérieur techniquement, et qui permit de tout numériser. Les images passèrent ainsi sur disque dur. Restait à les corriger (rayures, fragments absents, et autres scories), à les recolorier via la palette graphique là où les couleurs avaient disparu, et, bien entendu, à tout rassembler dans le bon ordre, en comparant avec les copies en noir et blanc qui avaient été conservées. La phase finale fut supervisée par un grand spécialiste de ce travail, Tom Burton (il a restauré Blade runner, entre autres).

Le documentaire est suivi par la projection du film de Mélies restauré.

En bref : à voir.Haut de la page

Le voyage dans la Lune

Lundi 18 décembre 2011

Réalisé par Georges Méliès

Sortie en France le 1er septembre 1902

Tombe de Méliès

Georges Méliès (1861-1938), qui réside aujourd’hui au Père-Lachaise, Division 64, avait débuté comme magicien professionnel, et il assista à la première projection cinématographique, sur les Grands Boulevards, le 28 décembre 1895, ce qui décida de sa vocation. Il tenta même d’acheter le matériel des frères Lumière, qui refusèrent de le lui vendre. Il se lança dans le cinéma de fiction dès 1896, et fit 552 courts métrages (aucun long métrage), écrits par lui et dans lesquels il apparaissait d’ailleurs. Les premiers trucages cinématographiques lui sont dus, et il en a usé abondamment.

Ses premiers tournages se firent au théâtre Robert-Houdin – qu’il avait acheté, et qui fut fermé en 1914 à cause de la guerre –, avant de construire le premier studio de cinéma à Montreuil.

Il faut noter que Méliès aurait volontiers commercialisé ses films aux États-Unis, mais les techniciens de Thomas Edison en avaient déjà piraté les premières copies, et il n’en tira pas un centime, ce qui contribua à sa ruine alors qu’Edison s’enrichissait !

Le film est inspiré à la fois de Jules Verne et de H.G. Wells, mais il y règne la plus grande fantaisie.

En bref : reprise. À voir.Haut de la page

Shame

Mardi 20 décembre 2011

Réalisé par Steve McQueen

Sorti en Italie (Festival de Venise), le 4 septembre 2011

Sortie en France le 7 décembre 2011

Le film a reçu un accueil enthousiaste de la part des critiques, mais il m’a semblé que, si l’on ne partage pas les obsessions du personnage central pour le sexe et la pornographie, on ne peut qu’estimer lugubres et pénibles ces errements au son d’une musique qui tente de montrer que tout cela est diablement sérieux. Mille regrets, ce film est une épreuve.

Un seul bon moment, de mon point de vue : quand Carey Mulligan, qui était si  bien dans Drive, reprend la chanson New York New York, sur un rythme très lent et d’une voix sourde. La séquence est filmée en trois plans seulement, un long sur l’interprète, un court sur le type qui l’accompagne, et un autre long sur la fille. Elle en fait quelque chose de mélancolique et de nostalgique, et c’est beaucoup mieux que Liza Minelli, laquelle appartient à la catégorie des chanteuses qui gueulent !

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Le voleur de Bagdad

Jeudi 22 décembre 2011

Réalisé par Ludwig Berger, Michael Powell et Tim Whelan

Titre original : The thief of Bagdad

Sorti aux États-Unis le 5 décembre 1940

Sortie en France le 11 avril 1946

Un conte de fée somptueusement réalisé à Londres par un trio de metteurs en scène, dont le célèbre Michael Powell, trop méconnu aujourd’hui, et qui fut l’un des grands du cinéma britannique. On y voit comment le gentil calife de Bagdad, Ahmad (joué par le très beau John Justin, d’origine argentine, et qui débutait à 23 ans), est dépossédé de son trône par l’affreux grand vizir Jaffar, mais le récupérera grâce à un petit voleur, Abou, qui devient son seul donc meilleur ami.

Abou est joué par Sabu, acteur indien qui, à seize ans, jouait dans son troisième film. Très populaire, il était voué aux films exotiques et féériques, Elephant boy, Alerte aux Indes, Le livre de la jungle, Les mille et une nuits, Le narcisse noir (autre film de Powell et Emeric Pressburger), Le trésor du Bengale, Les mystères d’Angkor ou Les  pas du tigre, son dernier film. Il est mort prématurément d’une crise cardiaque, à 39 ans.

Voir aussi ma notule sur les films passés à la télévision.

En bref : reprise. À voir.Haut de la page

Le Havre

Vendredi 23 décembre 2011

Réalisé par Aki Kaurismäki

Sorti en France (Festival de Cannes) le 17 mai 2011

Sortie en France le 21 décembre 2011

Il aura fallu qu’un cinéaste finlandais vienne montrer aux Français comment parler de leur pays ! Je suis persuadé qu’Aki Kaurismäki a vu Welcome, le film de Philippe Lioret qui a remporté un tel succès en 2009, et s’est dit, comme moi, que ce film était un peu surestimé, par son militantisme excessif et balourd, et par sa fin complètement invraisemblable (un jeune garçon sans aucun entraînement qui parvient – presque – à traverser la Manche à la nage). Je ne suis pas en train d’écrire que ce film était mauvais, mais Le Havre, sur le même sujet, est meilleur.

Bref, un jeune Noir, immigré clandestin, désire ardemment rejoindre sa mère à Londres, et il échoue dans cette ville si laide, Le Havre, mais parvient à échapper à la police, qui dès lors le recherche. C’est du reste le seul détail qu’on peut trouver lui aussi excessif, car enfin, le garçon ne représente aucun danger, et il aurait suffi de l’expulser vers l’Angleterre pour que tout le monde soit satisfait ! Or il est recueilli par un brave type, Marcel Marx, ancien écrivain raté qui s’est reconverti comme cireur de chaussures, vit avec une femme nommée... Arletty, et possède beaucoup d’amis parmi le petit peuple des quartiers pauvres, lesquels prennent son  parti et l’aident comme ils peuvent. Il n’est pas jusqu’au commissaire de police qui se révèlera un brave homme et fermera les yeux pour faciliter le départ d’Idrissa vers l’Angleterre, à bord d’un petit bateau.

Kaurismäki est le seul cinéaste finlandais que nous connaissions, et cela tombe bien, car il est le meilleur. Son film est composé de plans minutieusement cadrés, qui, tous, et sans insister, donnent une information sur les choses, sur les gens, sur ce qui se passe. En somme, il ne filme pas pour ne rien dire. On est très loin de ce cinéma qui vise bas pour mieux plaire, et ne réussit, à force d’esbrouffe, qu’à nous ennuyer.

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Hugo Cabret

Lundi 26 décembre 2011

Réalisé par Martin Scorsese

Titre original : Hugo

Sorti aux États-Unis (Festival de New York) le 10 octobre 2011

Sortie en France le 14 décembre 2011

Accident à Montparnasse

Non, l’image ci-contre ne tente pas d’insinuer que le film équivaut à une catastrophe ferroviaire, car Scorsese, abandonnant ses sempiternels films de gangsters, primaires et violents, produit enfin un bon film, destiné aux enfants et surtout aux cinéphiles (car les enfants sont rarement cinéphiles, sauf s’ils s’appellent JPM) ; mais il aura fallu attendre... trente-cinq ans, depuis Taxi driver, pour que cela se produise !

Encore son film n’est-il pas parfait : trop long, encombré de séquences en numérique tape-à-l’œil comme les deux travellings du début et de l’épilogue (si Scorsese aime les plans-séquences, que ne demande-t-il à Scola comment il a fait le sien dans Une journée particulière, en 1977, c’est-à-dire à une époque où le numérique n’existait pas ?), interprété par deux enfants qui, le garçon surtout, sont l’incarnation de la fadeur, il comporte aussi des épisodes dépassant la limite du ridicule, comme celui-ci : Georges Méliès confisquant à un gamin de douze ans le carnet qui réunit les trucs de feu son père, inventeur d’automates, et feignant d’avoir brûlé le précieux recueil pour ne lui restituer que des cendres ! D’où sort cette idiotie ?

Si l’on veut bien oublier l’erreur faisant dire à Méliès qu’il a découvert le cinéma dans une fête foraine (il l’a découvert lors de la première projection au Grand Café, établissement de luxe situé sur les Grands Boulevards, non loin de l’Opéra), le meilleur est dans l’exposé honnête et véridique des tribulations de Méliès, sa ruine (mais on oublie de dire qu’il la doit à un compatriote de Scorsese, le douteux Thomas Edison, inventeur illustre mais pilleur notoire des idées appartenant à d’autres), son modeste gagne-pain comme vendeur de jouets dans la gare Montparnasse, et sa redécouverte tardive par les critiques et le public. Sans oublier les séquences reconstituées de ses tournages à Montreuil, dans son studio personnel, et l’insert de quelques scènes extraites de ses films, dont Le voyage dans la Lune – en version coloriée. En prime, il ne manque même pas, toujours fruit du numérique, cet accident du train emballé, venu de Granville, qui traversa le mur du fond de la gare le 22 octobre 1895 et tomba dans la rue, un étage plus bas !

Le plaisir n’est pas absent, mais, je le répète, c’est trop long et trop voyant.

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Hollywoo

Mardi 27 décembre 2011

Réalisé par Frédéric Berthe et Pascal Serieis

Sortie en France et en Belgique le 7 décembre 2011

Pourquoi ce titre bizarre ? Parce que Florence Foresti et Jamel Debbouze sont allés se disputer, juchés sur la célèbre enseigne qui domine l’usine à films de Los Angeles, et qu’ils ont accidentellement descellé la dernière lettre. On voit combien les scénaristes français sont ingénieux...

À part cela, une idée de départ passable (une actrice du doublage, qui fait la voix française d’une vedette hollywoodienne dans un feuilleton à succès, va perdre son travail parce que ladite vedette veut abandonner le métier à la suite d’une déconvenue sentimentale, elle se précipite donc à Hollywood pour tâcher de la persuader qu’il faut continuer) donne lieu à une histoire qui ne tient guère debout, et dont aucun gag, aucune réplique ne font rire.

Signalons que Jamel Debbouze n’est là que parce qu’il est « bankable », mais son personnage ne sert absolument à rien. En fait, l’acteur le plus drôle du film s’appelle Ben Wise, et il joue le petit rôle du garde pakistanais hystérique à l’entrée des studios Paramount.

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Let me people go !

Jeudi 29 décembre 011

Réalisé par Mikael Buch

Sortie en France et en Belgique le 28 décembre 2011

Une affiche pas engageante, voire franchement ratée. Le titre, lui, fait allusion au prétendu exode des esclaves juifs hors d’Égypte, et le film Les dix commandements est cité via un passage télévisé (prétendu, parce que cette histoire adaptée de la Bible n’est qu’un mythe, les Égyptiens n’ayant jamais pratiqué l’esclavage).

La comédie, elle, est plutôt réussie, et commence par une séquence assez surprenante, qui montre la Finlande sous des couleurs saturées à l’extrême, ayant fait dire à certains qu’elle rappelait les films de Disney ; puis on revient à une photographie sans style particulier. Le personnage central, Ruben, est français, mais il exerce la profession de facteur en Finlande, parce qu’il est tombé amoureux d’un instituteur finlandais de son âge, Teemu. Mais un évènement extravagant les brouille, et Ruben, mis à la porte par son ami, retourne dans sa famille, à Paris. Et c’est là que le bât blesse, car cette famille est juive pratiquante, et toutes les contraintes de la religion s’abattent sur le pauvre Ruben, qui ne croit même pas en Dieu ! Le voilà donc déchiré...

Il est ainsi rappelé que les comédies sont en général fondées sur le malheur des autres, et qu’on ne rit que des ennuis qui frappent les innocents.

Le film est drôle, il est sympathique, pas vraiment inattendu, mais il tranche sur la grisaille du cinéma actuel. Notons pourtant que les deux scénaristes, le réalisateur de vingt-huit ans Mikael Buch, dont c’est le premier long-métrage après cinq courts, et son compère Christophe Honoré, auraient pu se renseigner un peu : trois fois dans le dialogue, ils prétendent qu’en Finlande, on parle « le finlandais » ! Navré, messieurs, cette langue n’existe pas, il n’y a que le finnois.

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La délicatesse

Vendredi 30 décembre 2011

Réalisé par David Foenkinos et Stéphane Foenkinos

Sortie en France, en Belgique et en Suisse Romande le 21 décembre 2011

Filmé, d’après son roman éponyme à succès, par David Foenkinos (avec son frère), c’est l’histoire très sentimentale d’une femme qui perd son mari accidentellement et ne se remet pas de sa mort. Du coup, plus aucun homme ne l’intéresse, pas même son séduisant patron qui se fait pourtant pressant. Mais, brusquement et sans raison apparente, elle tombe amoureuse d’un employé de sa boîte, un Suédois (très francisé) qui n’est pas vraiment attrayant. En fait, c’est le contraire exact de son mari disparu !

Le point faible de ce film est l’actrice Audrey Tautou : physiquement, elle est d’une fadeur telle qu’on se demande comment elle peut impressionner la pellicule. Quand à son talent, même avec le plus puissant microscope électronique, il est indécelable. Bref, elle plombe le film, qui finit par ennuyer. Mais ses trois partenaires masculins sont très bien dans leur rôle.

En bref : à voir à la rigueur.Haut de la page

Bruegel, le moulin et la croix

Vendredi 20 décembre 2011

Réalisé par Lech Majewski

Titres original : Mlyn i krzyz, et international : The mill and the cross

Sorti aux États-Unis (Festival de Sundance) le 23 janvier 2011

Sortie en France le 28 décembre 2011

Inspiré par le tableau de Pieter Bruegel l’Ancien, Le portement de croix, une huile sur panneau peinte en 1564 et qu’on expose à Vienne, au Kunsthistorisches Museum, ce film polonais est dû à Lech Majewski, qui a fait aussi la photographie, la musique et conçu le son.

 

Le portement de croix

 

Le film a été tourné en cinq lieux différents de la Pologne, mais les nuages, nécessaires à la confection des trucages numériques, ont été filmés... en Nouvelle-Zélande ! Ce raffinement inutile en fait les nuages les plus chers de l’histoire du cinéma.

En fait, tout est numérique ici, le but étant de raconter l’histoire de l’occupation espagnole de la Flandre et de ses atrocités, et la crucifixion présumée de Jésus, en utilisant les décors du tableau cité. Cette partie est très réussie, et la profondeur de champ permise par les images de synthèse reproduit de manière excellente la structure et les couleurs du tableau. Les dialogues, eux, sont réduits à leur plus simple expression.

Sur les intentions profondes de l’entreprise, on sera un peu plus sceptique, sans aller jusqu’à la juger complètement vaine, comme l’ont écrit certains pisse-vinaigre.

À noter, la réappariton de Michael York, honorable acteur britannique, très en vogue dans sa jeunesse (il était le Tybalt de Roméo et Juliette), et qui ne faisait plus guère que des téléfilms, ou alors dans des rôles minuscules, depuis fort longtemps.

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Dernière mise à jour de cette page le mardi 8 septembre 2020.