JPM - Films vus - Notules -  Octobre 2014

Notules - Octobre 2014

 

Plus courtes que les critiques, les notules traitent d’un ou plusieurs films, ou de sujets d’actualité en rapport avec le cinéma. Jusqu’en septembre 2004, elles provenaient de divers forums aujourd’hui disparus. Par la suite, elles s’en affranchissent et sont rédigées directement ici.

Œuvres citées (en italiques, autres que des films) : Brèves de comptoir PalaceThe tribePlemya – The artist – Silent Movie – Inception – Irréversible – Horns – Bodybuilder – Tuer un hommeMatar a un hombre – Le rideau déchiré – La femme infidèle – Cape fear (1991) – Cape fear (1962) – CasseLilting ou la délicatesseLiltingDracula untoldLe garçon et le mondeO menino e o mundoLes âmes noiresAnime nereMagic in the moonlight – My fair lady – Midnight in Paris – Le labyrintheThe maze runner – Batman returns – The dark knight – Inception – Interstellar – Le paradis – Cartouche – L’homme de Rio – Police Python 357 – À bout de souffle – La mariée était en noir – L’invraisemblable véritéBeyond a reasonable doubt – Le diabolique docteur Mabuse – Massacre à la tronçonneuseThe Texas chain saw massacreThe giver1984 – Gattaca – Salt

Personnes citées : Jean-Michel Ribes – Jean-Marie Gourio – François Morel – Myroslav Slaboshpytskiy – Isabelle Huppert – Mel Brooks –Marcel Marceau – Albert Dupontel – Alexandre Aja – Alexandre Arcady – Joe Hill – Stephen King – Daniel Radcliffe – Roschdy Zem – Vincent Rottiers – Alejandro Fernández Almendras – Alfred Hithcock – François Truffaut – Claude Chabrol – Grigori Raspoutine – Martin Scorsese – Jack Lee Thompson – Simon Pinochet – Nadège Trebal – Hong Khaou – Marie Dubois – Gary Shore – Charles Dance – Alê Abreu – Francesco Munzi – Woody Allen – Colin Firth – George Cukor – Pierre Carlet de Marivaux – Gérard Majax – James Randi – Rudy Geller – Wes Ball – Thomas Brodie-Sangster – Will Poulder – Christopher Nolan – Alain Cavalier – Daniel Boulanger – François Truffaut – Jeanne Moreau – Fritz Lang – Douglas Morrow ª Tobe Hooper – Lee Ermey – Philip Noyce

Brèves de comptoir

Jeudi 2 octobre 2014

Réalisé par Jean-Michel Ribes

Sorti en France à Dax (Festival Satiradax) le 8 juin 2014

Sorti en France le 24 septembre 2014

Le café L’Hirondelle est situé en face d’un cimetière de banlieue, ouvre à six heures et demie du matin et ferme à dix heures et demie du soir. De nombreux habitués le fréquentent quotidiennement, échangeant des propos banals ou saugrenus, souvent pittoresques. C’est le seul sujet du film, inspiré par les livres de Jean-Marie Gourio Brèves de comptoir – des recueils uniquement composés de répliques réellement échangés dans les cafés, assure l’auteur (mais il triche un peu, on le sait).

Présenté ainsi, cela ne ressemble pas à du cinéma, mais... c’en est quand même, et plutôt meilleur que les précédents films de Jean-Michel Ribes, qui est avant tout un directeur de théâtre, et avait déjà utilisé le procédé dans sa série télévisée Palace, en 1988. Il a employé soixante-seize acteurs, tantôt dans de grands rôles, tantôt dans de courtes scènes. Cela pourrait être creux et monotone, mais non, on ne s’ennuie pas et on sourit constamment.

Et puis, voir François Morel déguisé en hot-dog, c’est un spectacle rare !

Cela dit, nous n’étions que deux dans la salle...

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The tribe

Lundi 6 octobre 2014

Réalisé par Myroslav Slaboshpytskiy

Titre original : Plemya

Sorti en France (Festival de Cannes) le 21 mai 2014

Sorti en France le 1er octobre 2014

À ce film ukrainien tourné à Kiev et pourvu d’un titre dans sa langue d’origine, il fallait forcément, pour l’exploitation française, un titre anglais, qui en est la traduction exacte. Il lui fallait aussi une affiche racoleuse, évoquant plusieurs scènes interminables de copulation – d’ailleurs bidons, cela crève les yeux... Signalons enfin que le site Allociné, qui n’en est pas à un ridicule près, affiche sur la page du film un extrait pourvu de cette indication : « The Tribe - EXTRAIT VOST ». Quand on sait que ce film, muet, ne contient pas un seul mot de dialogue et n’est pas sous-titré, on rigole doucement.

Film muet et non sous-titré ? Annoncé dans le carton d’entrée, ce fait constitue l’essentiel de la publicité, et l’on se dit qu’enfin, on va échapper aux centaines de fuck et fucking des films venus d’outre-Atlantique, aux célèbres « Tu t’rappelles DE ça ? » d’Isabelle Huppert, et aux sous-titres burlesques concoctés par des traducteurs français illettrés, qui pensent que l’univers entier parle argot. Et l’on se souvient que, hormis pour le vrai cinéma muet, cela n’a jamais été fait, puisque The artist contient du dialogue quatre minutes avant la fin, et que le Silent Movie de Mel Brooks nous réservait un unique mot, « Non ! », le seul qu’ait proféré au cours de toute sa carrière artistique... le mime Marcel Marceau !

Mais ici, il ne s’agit pas de comédie, c’est un drame se déroulant dans une institution pour jeunes sourds-muets, où le personnel administratif et enseignant est également muet et ne s’exprime que par le langage des signes. Au début, on est curieux et donc intéressé, mais il est inexact que l’on comprenne les propos échangés, légende répandue par la publicité et par les critiques qui ont fait à ce premier long-métrage un accueil dithyrambique et un peu exagéré... comme on le fait toujours quand on ne comprend pas l’histoire ! (Voyez Inception)

Au chapitre du cinéma d’horreur, le spectateur se serait bien passé de cette scène d’avortement qui dure huit minutes (pas de gros plan, heureusement ; on ne voit rien, mais on entend les cris de cette jeune fille muette), ou du plan séquence final : un garçon, qui a été brutalisé et presque noyé par quatre condisciples racketteurs, veut se venger ; on le suit, sans aucune coupure, dans son ascension d’un escalier sur six étages, puis dans son avancée dans un long couloir, son irruption dans une première chambre où dorment deux de ses bourreaux, et le châtiment consistant à leur écraser la tête avec leur armoire de chevet ; puis sa sortie de la chambre et la répétition de l’épisode dans la chambre voisine, et enfin son retrait en direction de l’escalier. Fallait-il vraiment rééditer l’exécution d’Irréversible, où Dupontel massacrait un violeur à coups d’extincteur dans la face ?

Et puis, on est un peu étonné que tous les chauffeurs de camion auxquels on prostitue les filles de l’institution soient également muets !

Je sais, le prétexte est culturel : il paraît que le réalisateur a voulu symboliser le pourrissement de l’ex-Union Soviétique. Mais enfin, un peu de litote, de suggestion, de doigté et de subtilité ne feraient pas plus mal. On va donc voir le film par curiosité, et parce que la réalisation très soignée, en plan-séquences pris à la steadicam, est tout de même réussie. Mais beaucoup de scènes sont deux ou trois fois trop longues, la concision n’étant plus de mode.

Pour le fond, non, je ne marche pas.

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Horns

Mardi 7 octobre 2014

Réalisé par Alexandre Aja

Sorti au Canada (Festival de Toronto) le 6 septembre 2013

Sorti en France le 1er octobre 2014

J’apprécie beaucoup Alexandre Aja, qui est le fils d’Alexandre Arcady et a commencé à quatre ans dans un film de son père – il en a interprété trois autres. Il est devenu ensuite un très bon réalisateur, aux États-Unis, après deux films en France, restés assez confidentiels. Son domaine de prédilection est le fantastique mâtiné d’horreur, mais le présent film est surtout une fable sur la culpabilité.

Iggy et Merrin s’aiment depuis l’enfance, et sont devenus amants assez vite. Or, lorsque Merrin est retrouvée morte au pied d’un arbre, tout le monde pense qu’Iggy est le coupable, bien qu’aucune preuve n’existe. Il est défendu par son ami d’enfance, Lee, mais bientôt, des cornes poussent sur le front d’Iggy, indice qu’il est l’incarnation de Satan ! Néanmoins, en sa présence, tous ceux qu’il rencontre se mettent à dire leurs pensées et leurs désirs les plus honteux : sa mère, qu’elle aimerait bien qu’il quitte définitivement la maison ; son docteur, qu’il n’est pas certain de pouvoir l’opérer et qu’il n’a qu’une envie, copuler avec son infirmière ; le patron du bar qu’il fréquente, qu’il a envie de mettre le feu à son établissement afin de toucher l’assurance ; ses anciens copains devenus policiers, qu’ils sont homosexuels ; et ainsi de suite. Seul Lee, qui l’a autrefois sauvé de la noyade, ne voit pas les cornes d’Iggy et ne révèle rien de ses pensées secrètes.

On devine qu’Iggy va utiliser cette faculté de faire parler les gens afin de retrouver le coupable du crime, et le châtier. Il apprendra aussi que, si Merrin a voulu rompre avec lui c’était en réalité pour lui épargner une certaine révélation...

Le scénario, tiré d’un roman écrit par Joe Hill, fils de Stephen King, est ingénieux – malgré une entrée dans le vif du sujet un peu trop longue –, et la réalisation très bonne. Tout au plus peut-on estimer que le dénouement, surnaturel et fabriqué à grands coups de trucages numériques (Iggy devenant un ange, puis se muant en Satan ; Lee tué par des serpents), tire un peu trop vers la mode actuelle du fantastique de bas étage. Mais enfin, c’est plus réussi que la moyenne des films du même genre. Et sans être beau, Daniel Radcliffe est bon acteur.

Néanmoins, le film, plutôt déroutant, risque de n’avoir pas beaucoup de spectateurs.

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Bodybuilder

Jeudi 9 octobre 2014

Réalisé par Roschdy Zem

Sorti en France (Festival d’Angoulême) le 25 août 2014

Sorti en France le 1er octobre 2014

Une histoire sur l’honnêteté, la persévérance, la possibilité de se racheter, la solidarité humaine, réalisée très honnêtement par Roschdy Zem, qui se confirme comme un metteur en scène de qualité et qui ne fait jamais les pieds au mur, comme un certain « petit génie québécois » dont on parle un peu trop.

Bref, joué par Vincent Rottiers, excellent et discret, Antoine, vingt ans, par paresse et manque de sens moral, a escroqué tous ceux qu’il connaissait, et ses créanciers ont mis à sac son appartement. Sa mère et son frère le poussent à partir s’installer à Saint-Etienne, chez son père, Vincent, qu’il n’a pas revu depuis l’âge de cinq ans. Vincent, qui frise les soixante ans, n’a qu’une seule passion, le culturisme, et vise un titre prochainement décerné lors d’un concours de « bodybuilding ». Ce père, d’abord très froid et réticent, consent à l’héberger et à lui fournir un petit travail dans la salle de musculation qu’il possède. Au début, Antoine, incorrigible et qui doit rembourser une somme astronomique, ne résiste pas et vole les clients, mais tout s’arrange à la fin, avec l’aide des costauds qui ont participé au concours – que d’ailleurs Vincent a perdu – et le rachat d’Antoine sur le plan moral.

Le scénario est certes un peu naïf, mais cela nous change de ces innnombrables histoires basées sur le cynisme, qu’on déverse à longueur d’années sur les écrans. Et tous les interprètes, notamment le père culturiste (c’est un véritable athlète, dans la vie), sont crédibles. Notons qu’on ne tourne jamais en ridicule cette surprenante activité qu’est le culturisme, qui coûte beaucoup d’efforts et d’argent à ses adeptes, mais ne rapporte rien qu’un peu de gloire auprès des passionnés.

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Tuer un homme

Vendredi 10 octobre 2014

Réalisé par Alejandro Fernández Almendras

Titre original : Matar a un hombre

Sorti aux États-Unis (Festival de Sundance) le 17 janvier 2014

Sorti en France le 1er octobre 2014

On peut penser que ce titre et cette idée viennent d’une phrase d’Alfred Hitchcock dans ses conversations avec François Truffaut, abondamment reprise par la presse : à propos de son film Le rideau déchiré, il disait avoir voulu montrer combien il était long et difficile de tuer un homme. Or c’est le cas ici : un paisible père de famille (quoique divorcé) voit ses enfants menacés et brutalisés par une bande de voyous, que rien, pas même une injonction d’un juge, ne peut faire renoncer. Il se résoud alors à exécuter le chef de la bande : il l’attire hors de chez lui et, sous la menace d’un fusil, l’enferme dans un camion frigorifique. Et comme l’homme ne va pas mourir assez vite, il branche vers l’intérieur du camion des tuyaux pour y amener les gaz d’échappement. Lorsque l’homme est mort, il le conduit chez lui, puis vient quelques jours après récupérer le mort, l’envelopper dans du plastique, et le jeter à la mer du haut d’une falaise.

Ce thème a été utilisé par Chabrol dans La femme infidèle, par les diverses versions de l’histoire de Raspoutine, dans les deux versions de Cape fear (par Scorsese en 1991, et par Jack Lee Thompson en 1962), et dans bien d’autres films. La principale différence est qu’ici, l’exécuteur paisible, assez absurdement, va récupérer le corps sur le littoral, trouve une chaussure qui s’est détachée du cadavre, la remet en place, rembarque le corps dans le camion frigorifique, et va livrer le tout à la police !

Peu intéressé par le film, j’ai surtout noté qu’un des producteurs et preneur de son se nomme Simon Pinochet ! Il n’a pas pensé à prendre un pseudonyme ?

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Casse

Lundi 13 octobre 2014

Réalisé par Nadège Trébal

Sorti en France (Festival de Belfort) le 3 décembre 2013

Sorti en France le 1er octobre 2014

Un documentaire comme on aimerait en voir plus souvent : court et sans un mot de commentaire. Bien filmé, en outre, par une caméra qui montre ce qu’on doit voir et sans mouvements inutiles, alors que le sujet aurait pu susciter les habituelles gesticulations. Nous sommes au sein d’une casse de voitures, dans la banlieue nord de Paris, où des récupérateurs de pièces détachées, amateurs ou professionnels, tentent de trouver ce dont ils ont besoin. Travail pas facile, car extirper une vitre d’une portière ou desceller un pare-brise n’est pas si simple, comme le montre le film !

En fait, et puisque beaucoup de ces travailleurs pauvres sont des immigrés venus d’Afrique, il est permis de voir une allégorie dans ce film : la société de consommation rend les individus aussi jetables que les pièces détachées des voitures, et on y récupère ce qu’on peut.

La primauté est donnée à deux travailleurs africains, qui parlent surtout de leur vie quotidienne et de leur façon de survivre. Curieusement, ils apparaissent comme beaucoup plus optimistes que ces sempiternels râleurs que sont les Français !

Enfin, à l’écran, des êtres humains.

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Lilting ou la délicatesse

Mercredi 15 octobre 2014

Réalisé par Hong Khaou

Titre original : Lilting

Sorti aux États-Unis (Festival de Sundance) le 16 janvier 2014

Sorti en France le 15 octobre 2014

À Londres, deux jeunes hommes s’aiment et vivent ensemble depuis quatre ans. Kai est né d’un père français et d’une mère sino-cambodgienne, Junn, veuve installée comme lui à Londres mais qui ne s’est pas intégrée, n’a pas appris l’anglais, et qu’il a dû placer dans une maison de retraite qu’elle déteste car elle la trouve sinistre – elle exagère, l’endroit est parfait. Son ami anglais Richard le presse de tout avouer à sa mère, mais Kai ne cesse de reculer devant cet aveu. Or, le jour où il s’est enfin décidé à faire son coming-out, il meurt dans un accident de la circulation. Richard tente de venir à aide à Junn, mais elle le rejette et ne veut pas savoir qu’il aimait son fils.

La suite, qui a tout de la pièce filmée (deux décors seulement, la chambre de la mère et l’appartement des deux garçons), montre comment Junn et Richard vont faire chacun un pas dans la direction de l’autre. Il faut dire que Richard, interprété par l’excellent Ben Wishaw, est un garçon gentil et prévenant, qui est allé jusqu’à engager une interprète afin de pouvoir converser avec Junn – et c’est le seul point gênant du film que ces conversations traduites réplique après réplique, la traduction ne faisant une pause lorsque des sous-titres, inexplicables logiquement, la remplacent.

La pudeur de ce film n’exclut pas quelques passages comiques. Cambodgien, le réalisateur n’a fait avant Lilting que des courts métrages. Le titre, qui signifie cadence, reste néanmoins un peu énigmatique.

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Marie Dubois

Jeudi 16 octobre 2014

Elle aurait eu 78 ans le 12 janvier prochain, mais on vient d’annoncer sa mort. C’était une de ces actrices qui n’avait jamais eu la chance de tenir un premier rôle, mais, en quarante-quatre ans de métier, elle avait tout de même joué dans 87 films et téléfilms, sans jamais accéder au statut de ces grands seconds rôles si populaires, autrefois, dans le cinéma français.

Atteinte de sclérose en plaque depuis longtemps, elle s’était consacrée au militantisme au sein de l’UNICEP, qui lutte contre les diverses scléroses, après avoir quitté la profession.

Elle était belle, d’une beauté classique, et on l’aimait bien. Trop belle, peut-être, pour être populaire : des acteurs de second plan, on attend qu’ils soient davantage typés.

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Dracula untold

Jeudi 16octobre 2014

Réalisé par Gary Shore

Sorti en France, Belgique, Jamaïque et au Luxembourg le 1er octobre 2014

Ce « Dracula jamais raconté » bénéficie d’un scénario qui tente de renouveler le mythe, en s’appuyant sur une certaine réalité historique, et au prix d’un grand écart qui fait de ce personnage, non pas le premier, mais le deuxième vampire dans l’ordre chronologique, puisque celui qui lui passe le relais est une sorte de démon reclus dans une caverne, où ce grand acteur qu’est Charles Dance gagne de quoi payer ses impôts : on ne le voit sans son horrible maquillage que dans la scène de fin, qui se passe de nos jours et non plus au quinzième siècle.

Bref, au début, Dracula, qui se nomme encore Vlad et qui est le prince de Valachie, est un gentil, qui a eu le malheur de passer son enfance comme janissaire forcé chez les Turcs, et qui est devenu vassal du sultan Mehmet. Or celui-ci exige, comme tribut, qu’on lui donne mille garçons pour les enrôler dans son armée, avec, en prime, le propre fils de Vlad. Mais Vlad refuse, d’où une guerre.

Hélas, tout le reste n’est que castagne, bande sonore hurlante et déluge de trucages numériques, avec une prédilection pour la transformation des personnages en un essaim de chauve-souris ! En outre, les images sont très sombres et d’une laideur consternante.

Ce premier long-métrage de Gary Shore, réalisé en Irlande du Nord avec beaucoup de soin, d’argent et d’imagination, n’en est pas moins insatisfaisant, car tout le récit s’estompe derrière le souci d’en mettre plein la vue (et les oreilles), ce qui rabaisse le film au niveau d’un pur produit commercial.

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Le garçon et le monde

Vendredi 17 octobre 2014

Réalisé par Alê Abreu

Titre original : O menino e o mundo

Sorti au Canada (Festival d’Ottawa) le 20 septembre 2013

Sorti en France le 8 octobre 2014

Assez court, un film d’animation (le site Allociné note bêtement que les acteurs sont « inconnus »!). Au début, le dessin paraît plutôt simpliste, mais cela se sophistique plus loin, et tout devient plus élaboré. On suit un petit garçon à la tête ronde dans ses pérégrinations à la campagne, puis dans une grande ville, dans une sorte de féerie qui ne révèle son propos que peu avant la fin, quand des images réelles montrent la déforestation de l’Amazonie par des exploitants sans scrupules. C’était donc un film écologique, sans la lourdeur habituelle à ce type de production.

C’est beau, mais les spectateurs sont rares. Et les enfants, auxquels le film semblait destiné, auront du mal à suivre, car l’histoire est parfois obscure...

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Les âmes noires

Lundi 20 octobre 2014

Réalisé par Francesco Munzi

Titre original : Anime nere

Sorti en Italie (Festival de Venise) le 29 août 2014

Sorti en France le 1er octobre 2014

Très contrastée, cette famille de Calabre. L’aîné, Luciano, s’occupe de sa ferme comme son père, qui s’est fait assassiner par une famille rivale. Les deux autres frères, Luigi et Rocco, font dans le trafic de drogue, mais ils sont de caractères bien différents. Or Luciano a un fils, Leo, qui déteste la campagne, commence à tourner mal, et veut vivre à Milan avec celui de ses oncles qui est le plus ouvert et cordial, quand l’autre est assez coincé, franchement embourgeoisé.

Cela tournera très mal. Ledit oncle est assassiné, Leo veut le venger avant de se faire tuer à son tour, puis Luciano sort de sa réserve et tue le frère restant, qu’il rend responsable de cette cascade d’évènements. L’ambiance n’est pas à la fête, et cela pourrait néanmoins donner un film assez prenant, mais cette histoire ne dégage pas la moindre émotion, et il faut avouer qu’on reste assez indifférent.

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Magic in the moonlight

Mercredi 22 octobre 2014

Réalisé par Woody Allen

Sorti aux États-Unis le 25 juillet 2014

Sorti en France le 22 octobre 2014

Woody Allen, qui est rationaliste, ne veut certainement pas nous faire croire que son personnage principal, le magicien Stanley Crawford, joué par le réjouissant Colin Firth, s’est converti à la magie. En fait, c’est à celle que dégagent la poésie et l’amour qu’il se rallie, après avoir été (presque) dupé par une fausse voyante dont il est tombé amoureux, ce à quoi on s’attendait depuis le début. Prié par un ami, magicien aussi, de démasquer celle-ci (en fait, c’est l’ami, jaloux de son succès, qui soufflait à la demoiselle tout ce qu’elle était censée deviner), il est immédiatement démasqué par elle, et pour cause !

Le meilleur du film est dans le charmant caractère de ce Stanley, pessimiste, critiquant tout le monde, et imbu de lui-même, qu’il est impossible de ne pas comparer à celui du professeur Higgins de My fair lady, misogynie en moins. Il faut néanmoins regretter que la séquence sentimentale de la fin traîne en longueur, alors que, dans la comédie de George Cukor, le revirement du misanthrope se résumait à une seule réplique : « Apportez-moi mes pantoufles ! ». C’était autrement sobre et spirituel. Mais la meilleure scène du film est dans la conversation, digne de Marivaux, entre le magicien et sa tante Vanessa, lorsque celle-ci, qui use d’une maïeutique à rebours en prêchant le faux pour faire surgir l’évidence du vrai, incite son neveu à prendre concience qu’il aime cette femme, en dépit de l’imposture qu’elle représente.

Soit dit en passant, le personnage de Stanley rappelle deux magiciens bien réels, Gérard Majax et James Randi, qui se sont fixé pour mission de dévoiler les trucages des escrocs (par exemple Rudy Geller, le célèbre « tordeur de cuillères », aujourd’hui tombé dans l’oubli, et qui prétendait pouvoir... tordre la Tour Eiffel), et ont toujours collaboré avec les véritables scientifiques pour dénoncer le paranormal.

Bref, le film est agréable à suivre, d’autant plus qu’il a été réalisé – et superbement photographié – sur la Côte d’Azur, avec une équipe technique presque entièrement française. Négligez les perfidies sur la « carte postale », qui pleuvaient déjà sur Midnight in Paris, et ne boudez pas votre laisir.

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Le labyrinthe

Vendredi 24 octobre 2014

Réalisé par Wes Ball

Titre original : The maze runner

Sorti au Mexique, en Malaisie et à Singapour le 11 septembre 2014

Sorti en France le 15 octobre 2014

Film fantastique et premier long-métrage de son réalisateur : un groupe de garçons est retenu prisonnier dans une plaine entourée de hautes murailles, et n’est ravitaillé que par un ascenseur qui surgit du sol et amène chaque mois un nouveau prisonnier qui a perdu la mémoire de tout ce qu’il a vécu. Dans ces murailles, une porte s’ouvre le jour (et se referme la nuit) sur un immense labyrinthe qui change de configuration chaque nuit. Des garçons rapides explorent ce labyrinthe en courant pour tâcher d’en établir le plan, alors que la règle interdit toute tentative de fuite.

On se doute bien qu’un nouveau venu va changer tout cela et qu’un groupe de réfractaires va réussir à sortir, après avoir combattu d’horribles monstres en forme de scorpions géants fabriqués en numérique (gadget superflu dans un récit qui aurait pu s’en passer facilement), mais pour apprendre un horrible secret : tous appartiennent à un groupe de mutants, encasernés là par des scientifiques pour tenter de récréer un monde extérieur détruit par le Soleil, lequel s’est détraqué. Mais rien n’est vraiment dévoilé, et une mystérieuse allusion à une « Phase 2 » qui doit suivre laisse la fin ouverte.

Le scénario est intéressant, le récit est plutôt prenant, et les jeunes acteurs sont très bons. Peu sont connus, excepté Thomas Brodie-Sangster, naguère voué aux rôles de petit garçon, et Will Poulder, au visage étrange, et qui joue le chef du groupe des méchants ne voulant pas s’échapper. Malheureusement, la réalisation n’est pas à la hauteur, car tout est filmé par une caméra portée gesticulante, et les gros plans inutiles abondent.

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Retour vers... le passé

Vendredi 24 octobre 2014

Christopher Nolan, l’auteur des excellents Batman returns et The dark knight et de l’exécrable Inception, sort à Paris, le 5 novembre,son nouveau film Interstellar. Encore un film interminable : deux heures et 49 minutes. Le film sortira notamment au Max-Linder, la meilleure salle de Paris en ce qui concerne le son – hors Imax. Or ce cinéma a annoncé qu’il passera le film dans sa version sur pellicule 35 millimètres. Et c’est d’autant plus illogique que le film, comme les précédents films de Nola depuis Batman returns, a été réalisé avec le procédé Imax, qui n’utilise pas ce type de pellicule, mais de la pellicule 70 mm – voir ci-dessous – défilant horizontalement, comme naguère avec la Vistavision, et offrant une surface 8,32 fois plus grande.

 

Imax

 

Prodigieux bond en arrière. Alors que cette salle a été l’une des premières à projeter les films en numérique, procédé qui est un progrès incontestable, la voilà qui revient à un support antédiluvien, la pellicule, rassemblant tous les inconvénients, sans doute par simple snobisme, celui qui fait préférer les disques en vinyle alors que le CD est bien meilleur.

La pellicule, en effet, présente les inconvénients suivants :

- elle s’use et se raye, ce qui rend l’image assez vite irregardable ;

- elle se casse, ce qui oblige le projectionniste à une longue réparation interrompant la séance ;

- la chaleur peut y mettre le feu, ou au moins trouer la pellicule, ce qui interrompt la séance ;

- sous l’action de la chaleur toujours, la pellicule se gondole, et donc l’image n’est plus au point, or, connaissant la conscience professionnelle des projectionnistes, il peut s’écouler de longues minutes avant que la mise au point soit corrigée... si un spectateur va se plaindre à la caisse que l’image est floue, ce qui est rarissime ;

- enfin, l’image n’en est pas meilleure pour autant.

Je crois que, pour une fois, j’irai voir le film dans une autre salle.

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Le paradis

Lundi 27 octobre 2014

Réalisé par Alain Cavalier

Sorti en France (Festival de La Rochelle) le 5 juillet 2014

Sorti en France le 8 octobre 2014

Alain Cavalier filme de petits objets auxquels il donne l’attitude de personnages, et raconte la Bible à sa façon. Tout cela est un peu vain, et le seul épisode intéressant est celui qui sert de fil conducteur à tout le film : le tombeau qu’il a fait fabriquer en forêt pour un petit paon mort très tôt. Le jeune homme qui a fait le travail a fini par se passionner, et fignole le résultat.

On comprend que le réalisateur, très bavard, a tenté de filmer ses souvenirs de la beauté et de quelques instants de bonheur. Mais l’émotion est rare, pour le spectateur.

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Daniel Boulanger

Mardi 28 octobre 2014

On annonce la mort de Daniel Boulanger, décédé hier soir, à 92 ans. C’était un écrivain assez connu, auteur de nouvelles (j’en ai lu quelques-unes), mais il a beaucoup écrit également pour le cinéma, et on lui devait les scénarios de Cartouche, L’homme de Rio, Police Python 357, et tant d’autres. Il s’amusait aussi à tenir de petits rôles dans les films des réalisateurs pour lesquels il écrivait : il a débuté en 1960 dans À bout de souffle, et il apparaissait dans trois films de Truffaut, dont La mariée était en noir, le meilleur film de ce metteur en scène, où il jouait le garagiste truand que Jeanne Moreau poignardait dans la denrière scène. Avec son physique de grosse brute, ce qu’il n’était pas, il faisait merveille !

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L’invraisemblable vérité

Mercredi 29 octobre 2014

Réalisé par Fritz Lang

Titre original : Beyond a reasonable doubt

Sorti aux États-Unis le 5 septembre 1956

Sorti en France le 31 juillet 1957

Ressorti en France le 1er octobre 2014

On pense avoir affaire à l’adaptation d’une pièce de théâtre à thèse, mais il n’en est rien, l’auteur du scénario. Douglas Morrow, était auteur et acteur de cinéma. Quant au film, il laisse perplexe, car on se demande ce qui a pu attirer Lang, réalisateur renommé, dans cette histoire totalement invraisemblable : le journaliste Garrett et son patron Spencer, tous deux opposés à la peine de mort, montent un « coup » pour prouver que la Justice n’est pas à l’abri de commettre une erreur judiciaire. Utilisant une affaire de meurtre non élucidée – d’une jeune femme qui travaillait dans divers cabarets –, ils fabriquent de faux indices permettant d’accuser du meurtre... Garrett lui-même ! Et Spencer se charge de photographier tous les détails de la dissémination des faux indices, afin de les produire lorsque Garrett aura été condamné.

Cela fonctionne bien, Garrett est arrêté, jugé et condamné à mort. Mais, au moment de révéler la supercherie, Spencer meurt dans un accident, et nul ne sait où il a caché les preuves de la mystification. De son côté, la fiancée de Garrett, qui est aussi la fille de Spencer, fait faire une enquête par un ami, lequel découvre le véritable nom de la fille assassinée, Emma, et le nom d’un autre suspect. Hélas, cet autre suspect est mort quatre ans avant le meurtre. Par chance, on parvient à retrouver la preuve que Spencer a semé de faux indices. Garrett est-il sauvé ? Non, car il commet la bévue de citer le vrai nom de la fille morte, qu’il n’est pas censé connaître. Il finit par avouer à Susan qu’il a effectivement tué Emma parce qu’il a été marié avec elle, et qu’elle ne voulait pas divorcer, ce qui empêchait son remariage avec Susan. Effondrée, Susan téléphone au gouverneur qui s’apprêtait à signer la grâce du condamné. Garrett ira donc sur la chaise électrique !

Ces retournements de situation, à vrai dire, ne surprennent pas le public, lequel connaît la loi du genre, et le film, qui est le dernier réalisé par Lang aux États-Unis avant qu’il retourne en Allemagne signer quatre films mineurs (Le diabolique docteur Mabuse et ses trois films indiens, autant de navets), montre que même un réalisateur classique peut se prendre les pieds dans le tapis.

*

Le site Allociné, qui publie les programmes de cinéma, signale que le film est projeté (une seule fois) en VO et « en numérique ». C’est faux, il est sur pellicule, et les spectateurs le constatent immédiatement, car la projection réunit tous les inconvénients que j’ai mentionnés ci-dessus, dans mon article sur la prochaine sortie d’Interstellar : images rayées ou manquantes, son défectueux, et même une cassure de la pellicule pendant la projection !

On a voulu me donner raison ?

En bref : reprise. Inutile de se déranger.Haut de la page

Massacre à la tronçonneuse

Jeudi 30 octobre 2014

Réalisé par Tobe Hooper

Titre original : The Texas chain Saw massacre

Sorti aux États-Unis le 1er octobre 1974

Sorti en France le 5 mai 1982

Ressorti en France le 29 octobre 2014

Cette ressortie ne s’imposait pas vraiment, et le film a beaucoup vieilli. En réalité, il ne comporte aucune scène de gore, et s’achève presque sur une scène de comique pur : les petits-enfants monstrueux veulent faire un cadeau à leur grand-père, et lui offrent une jeune fille à estourbir. Mais, très faible, le grand-père n’a pas la force de soulever le marteau qu’ils lui tendent, et le laisse chaque fois échapper. Si bien que la fille, pourtant maintenue par quatre hommes, parvient à s’échapper !

Le film, à vrai dire, est très inférieur à l’un de ceux qui l’ont imité, sorti en 2003 avec le même titre (Tope Hooper avait participé au scénario), dans lequel jouait Lee Ermey.

Au cas où vous vous étonneriez que ce film, sorti en 1974 aux États-Unis, n’est sorti en France qu’en 1982, voici l’explication : il avait été « classé X » chez nous le 23 novembre 1976, non pas pour pornographie, mais pour violence. Pour plus d’informations sur le classement X, je vous renvoie à mon Entracte 18, qui donne davantage de précisions sur ce sommet de l’hypocrisie gouvernementale. Et lorsque cette classification est tombée en désuétude et que sept des dix films « iXés » ont été déclassifiés entre le 13 juin 1980 et le 8 avril 1982, Massacre à la tronçonneuse a pu sortir normalement. On a pu alors constater de visu qu’il ne cassait pas trois pattes à un canard !

En bref : reprise. À voir à la rigueur.Haut de la page

The giver

Vendredi 31 octobre 2014

Réalisé par Philip Noyce

Sorti aux États-Unis le 11 août 2014

Sorti en France le 29 octobre 2014

Le film suit la mode, il adapte un livre pour jeunes, une saga en quatre volumes dont on voit ici le premier, et qui sera peut-être suivie du tome 4 – les deux autres ayant une histoire et des personnages différents. C’est un peu 1984, mais sans le communisme, avec, encore une fois, un personnage qui se révolte contre le régime après avoir pris conscience de ses tares (il y avait le même thème dans le célèbre Gattaca). La différence, c’est que ce régime n’a rien de sinistre, il a en fait été instauré pour remédier aux atrocités que nous constatons dans le nôtre, et Big Brother est remplacé par une assemblée de sages que nous ne verrons pas, hormis la Grande Sage, incarnée par Meryl Streep.

Évidemment, il y a quelques règles : employer un langage précis, accepter toutes les excuses d’autrui, recevoir une injection quotidienne pour rester en condition, etc. Quelques obligations, aussi : ne pas franchir les limites de la cité, et, au sortir de l’enfance, chacun reçoit une affectation correspondant à ses dispositions personnelles, si bien que tout le monde est parfaitement intégré. Enfin, on a effacé quelques particularités : plus de livres, plus de musique, plus de souvenirs, plus de couleurs, plus de sentiments, donc plus d’amour, qui est ainsi devenu un état étranger aux humains de ce monde nouveau.

Un seul résident est chargé, en cas de besoin, de conserver tous les souvenirs éradiqués, le Passeur. Pour le moment, c’est un homme âgé vivant reclus dans une maison à l’écart, mais il est temps qu’il initie son successeur, et ce sera le jeune Jonas, qui a toutes les qualités requises. Mais cela se passera mal, sinon il n’y aurait pas de film, et notamment parce que Jonas a découvert que les nourrissons pas assez robustes sont « élargis », c’est-à-dire euthanasiés ! Lorsque cela tombe sur son petit frère Gabriel, il s’enfuit avec lui et devient un fugitif. Mais, fin heureuse oblige, c’est lui qui va gagner en restituant leurs souvenirs aux habitants de la cité.

La réalisation se fonde entièrement sur l’identification du spectateur à Jonas, ce qui est facile, puisque l’acteur australien qui l’incarne, Brenton Thwaites, plus jeune que son personnage – il a vingt-cinq ans –, est d’une grande beauté. En fait, personne dans le film n’est laid ni antipathique. Néanmoins, le film suscite quelques réactions dubitatives, où l’on évoque une certaine mièvrerie sur la conclusion, un peu trop optimiste.

Quant au réalisateur, australien également, il a commis naguère le navrant Salt. Ce dernier film est plutôt moins ridicule.

En bref : à voir.Haut de la page

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Sites associés :    Yves-André Samère a son bloc-notes 122 films racontés

Dernière mise à jour de cette page le samedi 12 septembre 2020.