JPM - Films vus - Notules -  Février 2012

Notules - Février 2012

 

Plus courtes que les critiques, les notules traitent d’un ou plusieurs films, ou de sujets d’actualité en rapport avec le cinéma. Jusqu’en septembre 2004, elles provenaient de divers forums aujourd’hui disparus. Par la suite, elles s’en affranchissent et sont rédigées directement ici.

Œuvres citées (en italiques, autres que des films) : Tucker & Dale fightent le malTucker and Dale vs EvilDetachmentAnother happy day – We need to talk about Kevin – Millenium : Les hommes qui n’aimaient pas les femmes (2011) – The girl with the dragon tattooIl n’y a pas de rapport sexuelLa taupeTinker, tailor, soldier, spyJ-C comme Jésus ChristGuerre des Juifs – Grosse fatigue – Une bouteille à la mer – L’outremangeur – Anonymous – 2012 – Sweeney Todd, le diabolique barbier de Fleet Street – Défense de WillLa vérité si je mens 3King Kong (1933)La grande illusion – Cheval de guerre – Indiana Jones et le temple maudit – 1941 – Du silence et des ombresTo kill a mockingbird – L’autre – Un été 42 – Le procès Paradine – Cape Fear (1960) – Cheval de guerreWar horse – Empire du Soleil – Il était une fois, une fois – The prodigies – La mer à boire – The artist – Intouchables – La guerre est déclarée – Une séparation – Le nouvel HollywoodSexe, mensonges et HollywoodDos au murMan on a ledgeLa vie d’une autre

Personnes citées : Eli Craig – Tony Kaye – Sam Levinson – Michael Nardelli – Ezra Miller – David Fincher – Niels Arden Oplev – Noomi Rapace – Daniel Craig – Raphaël Siboni – Hervé-Pierre Gustave – HPG – Catherine Breillat – Jonathan Zaccaï – Marc Dutroux – Flavius Josèphe – Michel Blanc – Thierry Binisti – Éric Cantona – Roland Emmerich – William Shakespeare – Edward De Vere, comte d’Oxford – Sigmund Freud – Bonac-Melvrau – Francis Bacon – Vanessa Redgrave – Elizabeth Ire – Jamie Campbell Bower – Thomas Gilou – Ernest B. Schoedsack – Merian C. Cooper – Patrick Cohen – Steven Spielberg – Jean Renoir – Françoise Giroud – Jean Gabin – Marcel Dalio – Dita Parlo – Pierre Fresnay – Erich von Stroheim – Robert Mulligan – Gregory Peck – Marlon Brando – François Truffaut – Christian Merret-Palmair – Stéphane Bern – Jacques Maillot – Omar Sy – Jean Dujardin – François Cluzet – Bérénice Béjo – Matt Damon – Asger Leth – Pablo F. Fenjves – Jamie Bell – Sylvie Testud

Tucker & Dale fightent le mal

Vu le jeudi 16 décembre 2011 - Sorti le 1er février 2012

Réalisé par Eli Craig

Titre original : Tucker and Dale vs Evil

Sorti aux États-Unis (Festival de Sundance), le 22 janvier 2010

Sortie prévue en France le 1er février 2012

Le film est si mauvais qu’il aura fallu plus de deux ans après sa présentation dans un festival pour qu’il soit programmé en France. C’est le genre de navet qui s’autodétruit automatiquement, et pour cette raison très simple : il prétend faire rire avec le gore, mais les scènes d’horreur qu’il montre sont bien réelles. Et l’on se souvient d’un film britannique plus talentueux, Shawn of the dead, où la même erreur était commise, quoique bien plus tard – aux deux tiers du film. Là, les deux personnages de ringards prenaient les vrais morts-vivants (si je puis dire) pour des ivrognes ou des drogués, confusion drôlatique, avant de comprendre que le fléau était bien réel. Et le public cessait de rire quand l’un des deux se voyait obligé d’abattre sa propre mère ! Ici, dès le début, les deux ploucs innocents assistent à des massacres dont ils sont tenus pour responsables alors qu’ils n’ont rien à se reprocher, et ces horreurs sont filmées complaisamment : le corps coupé en deux d’une des victimes reste à l’écran, barbaque sanguinolente au premier plan, durant de longues secondes.

Ce film court, 89 minutes, paraît bien long.

En bref : inutile de se déranger.Haut de la page

Detachment

Vu le jeudi 5 janvier 2012 - Sorti le 1er février 2012

Réalisé par Tony Kaye

Sorti aux États-Unis (Festival de Tribeca) le 25 avril 2011

Sortie en France le 1er février 2012

Henry Barthes est un professeur remplaçant, ce qui tombe bien, car il semble incapable de se fixer. Bien entendu, il arrive dans un lycée à problèmes : pas rentable, élèves et parents agressifs, et celle qui le dirige va bientôt être renvoyée. La loi du genre exige qu’il rencontre une foule de problèmes, dont l’hostilité d’une poignée d’élèves voyous, qu’il va réussir à dompter par la vertu de sa seule parole : à l’épilogue, le garçon le plus hostile, noir évidemment, lui mange dans la main – très crédible épisode, qu’on voit au cinéma depuis Blackboard jungle, en 1955 (à l’époque, c’était Sidney Poitier, le méchant qui devient gentil).

Barthes n’est là que pour trois semaines, et ce qui lui arrive va tourner autour de deux filles et une femme : une de ses élèves, intelligente et douée pour la création photographique, mais un tantinet obèse et qui à la fin se suicide par le poison ; une très jeune prostituée qu’il héberge mais dont il doit se séparer « parce que c’est mieux pour elle », alors qu’elle vient justement de tomber amoureuse de lui ; et une collègue un peu trop passionnée. Il y a aussi son père, qui agonise dans un hôpital, qui perd la mémoire, et dont on croit comprendre que « quelque chose » (pédophilie ?) les a séparés, mais cela reste assez flou. Bref, tout ce monde se débat dans des problèmes matériels et moraux dont on a compris d’avance qu’ils seront sans solution.

C’est le type même de la barque surchargée de bonnes intentions, qui ne se traduisent à l’écran par rien de passionnant. Le scénario fait eau de toutes parts, et la réalisation, reposant sur une prise de vues en caméra portée tremblotante ne prenant que des gros plans, sur des flashbacks rapides et teintés en rouge, et sur un commentaire marmonné par le personnage principal, bref, un foutoir, s’avère incapable d’en tirer quoi que ce soit.

Depuis American history X, je savais que Tony Kaye était aussi mauvais scénariste que mauvais réalisateur. On en a donc ici la confirmation, et, pour son prochain film, je m’abstiendrai de me déplacer.

En bref : inutile de se déranger.Haut de la page

Another happy day

Jeudi 2 février 2012

Réalisé par Sam Levinson

Sorti aux États-Unis (Festival de Sundance) le 23 janvier 2011

Sortie en France le 1er février 2012

Remise au goût du jour, pas très différent du goût précédent, du film choral en forme de jeu de massacre contre la famille.

Dylan, jeune homme très beau et très sain, joué par Michael Nardelli (qui a fait surtout de la télévision, et qui aussi l’un des producteurs du film), se marie chez ses grands-parents. Ses parents sont divorcés, comme tout le monde, et il a été élevé par sa belle-mère, mais il a choisi sa mère pour le conduire à l’autel. Crise entre les deux femmes, et ce n’est pas la seule.

En fait, presque tout le monde est bargeot, dans cette famille, ce pour quoi le film a été sélectionné au festival de Sundance. Le personnage le plus gratiné est Elliott, demi-frère de Dylan : 17 ans, drogué, buveur, destructeur et qui déteste le monde entier. Il est interprété par Ezra Miller, qui jouait le jeune assassin dans We need to talk about Kevin. Il est excellent, au demeurant, mais le voilà parti pour jouer les dingues tout au long de sa carrière.

Le film, doté d’une fin incompréhensible, n’est pas désagréable à suivre, mais on peut s’absenter pour aller faire un tour aux toilettes sans rien perdre d’important.

En bref : à voir à la rigueur.Haut de la page

Verdict pour Duch

Veendredi 3 février 2012

À propos du film sur Duch dont j’ai parlé le mois dernier, on apprend ce matin que le verdict a été rendu, et que la précédente condamnation du chef tortionnaire cambodgien à trente-cinq ans d’emprisonnement est confirmée. Il ne sera donc pas remis en liberté, ce qui eût été un comble.

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Millenium : Les hommes qui n’aimaient pas les femmes (2011)

Vendredi 3 février 2012

Réalisé par David Fincher

Titre original : The girl with the dragon tattoo

Sorti au Royaume-Uni le 12 décembre 2011

Sortie en France le 18 janvier 2012

La principale vertu de ce remake, réalisé par un metteur en scène très coté mais qui, selon moi, a fait mieux, c’est de prouver par l’exemple que connaître la fin d’un film ne diminue pas l’intérêt qu’on peut y prendre.

Cela étant, on a beaucoup écrit et dit que la première version, réalisée en 2009 par Niels Arden Oplev, était plate, en comparaison, voire à la limite de la médiocrité. Or c’est assez injuste. On aurait presque envie de la revoir, pour vérifier. Mais 152 minutes pour celle-ci et 158 minutes pour le remake, c’est peut-être un peu trop pour une vérification...

Un dernier détail : je n’aimais ni le personnage de Lisbeth Salander ni son interprète Noomi Rapace. Mais celle qui la remplace est presque transparente ! Daniel Craig, au contraire, est très bien, meilleur qu’en James Bond. Cela dit, ce n’est pas le chef-d’œuvre de l’année.

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Il n’y a pas de rapport sexuel

Lundi 6 février 2012

Réalisé par Raphaël Siboni

Sorti en France (Festival de La Roche-sur-Yon) le 15 octobre 2011

Sortie en France le 11 janvier 2012

Louons Raphaël Siboni pour son courage et sa persévérance : visionner des milliers d’heures de prises de vues capturées par une caméra fixe filmant des tournages pornographiques afin d’en tirer un documentaire, c’est un bel exploit... qui n’aura pas de lendemain ! Lors de la séance où j’ai vu le film et qui, exceptionnellement, n’avait pas lieu à 22 heures, au moins une demi-douzaine de spectateurs ont gagné la sortie en cours de projection. Des voyeurs qui s’étaient trompé de salles ?

C’est que tout cela est extrêmement ennuyeux. D’abord, la totalité des « acteurs » sont d’une laideur affligeante. Et puis, mais ce n’est pas une surprise, les actes sexuels représentés sont la plupart du temps bidonnés (et joués par des gens qui s’ennuient visiblement). Par exemple, un homme doit donner des claques sur les fesses d’une fille qu’il est censé honorer ; or, non seulement l’acte est hors champ et donc on ne le filme pas, mais les baffes qu’on enregistre sur la bande-son, il les obtient en claquant... dans ses mains.

Enfin, le personnage principal du film, celui qui a fait filmer tous ses tournages, est un acteur porno, Hervé-Pierre Gustave, 45 ans, au physique peu attirant, qui se fait appeler HPG parce que c’est plus branché, qui a joué dans... six cents films (!), parmi lesquels un de Catherine Breillat, ce qui ne surprendra personne, dont seul le snobisme des gogos a fait une vedette, et qui se prend depuis peu pour un metteur en scène de cinéma ; prétention donnant lieu à la séquence la plus hilarante du film, lorsqu’il tente d’expliquer à un acteur et deux actrices – qui s’en fichent – le scénario que lui-même a toutes les peines du monde à imaginer, du genre « un type a dragué une fille mais elle veut se venger et l’attire dans un appartement où, etc. ». Et dire que ce ringard se prétend « trop avant-gardiste », et « pas assez commercial » (sur ce dernier point, on ne le contredira pas !).

Entendons-nous bien : je ne suis pas un pisse-vinaigre qui condamne le cinéma porno parce qu’il est porno. C’est la médiocrité du film et du personnage qui incite à s’interroger. Avec cela, un vrai saligaud : afin de pouvoir le filmer en train de se faire sodomiser, il fait croire à un jeune Noir de 19 ans, d’ailleurs assez laid, qu’une grande carrière s’offre à lui et qu’il va pouvoir, ensuite, tomber toutes les filles. L’idiot n’y voit pas malice et accepte tout...

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La taupe

Vu le mercredi 18 janvier 2012 - Sorti le 8 février 2012

Réalisé par Tomas Alfredson

Titre original : Tinker, tailor, soldier, spy

Sorti en Italie (Festival de Venise) le 5 septembre 2011

Sortira en France le 8 février 2012

Adaptation du huitième roman de John Le Carré, peut-être le plus connu, et déjà ancien (1974). Son titre original, assez curieux, vient d’une comptine – raccourcie – que fredonnent les enfants anglais, mais le dernier mot, thief (voleur) a été remplacé par spy ; il signifie à peu près « Bohémien, tailleur, soldat, espion », et résume en quelque sorte la composition des services secrets du Royaume-Uni, le MI6, également surnommé « le Cirque ». Comme j’ai lu ce roman et quelques autres du même auteur, je suis assez bien placé pour affirmer que le cinéma est impuissant à reproduire ce type de récit, trop foisonnant pour supporter la simplification nécessaire à un film, qui, sans cela, reste incompréhensible. Et c’est le cas ici : sans arrêt, des personnages dont le public n’identifie ni les noms ni les fonctions – ou alors, après un délai prohibitif –, parlent d’autres personnages qu’on ne voit pas, qu’on n’a pas encore vus, qu’on a vus et qu’on a oubliés, etc. Sans arrêt, on les voit accomplir des actions dont on ne comprend pas les motivations. Outre cela, le récit fait sans cesse des allées et venues entre le présent et le passé, qui n’améliorent pas la compréhension. Et cela dure ici plus de deux heures...

On vérifie ainsi que le roman convient à certains genres, comme l’espionnage, et que le cinéma n’y convient pas. L’explication est évidente : lorsque, lisant un roman, vous vous sentez un peu perdu, vous pouvez toujours revenir en arrière de quelques pages ou de quelques chapitres ; au cinéma, impossible, et quand la confusion s’installe, c’est irrémédiable. L’ennui vient avec.

John Le Carré est un grand romancier, mais la plupart des adaptations de ses livres au cinéma sont des échecs. Néanmoins, le film aura du succès, parce que la mise en scène et l’interprétation, de qualité britannique, sont impeccables, et que le public fera semblant d’y croire.

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J-C comme Jésus Christ

Mercredi 8 février 2012

Réalisé par Jonathan Zaccaï

Sorti en Belgique (Festival de Namur) le 2 octobre 2011

Sortie en France le 8 février 2012

Jean-Christophe Kern est tenu pour un génie par tout le monde et par lui-même – bien que profondément imature, chacun le reconnaît. Cinéaste précoce, il a décroché la Palme d’Or à quinze ans et un César à seize, de sorte que tout le monde le courtise et que la télévision fait un reportage de plus de deux semaines sur sa vie quotidienne. Or il doit passer le bac et préparer son prochain film, Dutroux in the rains, film musical sur Marc Dutroux, dans lequel il compte le montrer déjà pédophile à... huit ans ! Mais son producteur, sceptique, lui réduit son budget, et JC décide alors de changer sa caméra d’épaule et d’adapter Guerre des Juifs, de Flavius Josèphe !

Le film est évidemment une pochade, où quelques vedettes viennent faire une apparition dans leur propre rôle, selon un système souvent éprouvé, parce qu’il plaît beaucoup au public : voir Grosse fatigue, de Michel Blanc. Seulement, bien que court, une heure et quart, le film tient difficilement la route, et l’on ne peut rire aussi longtemps, à n’entendre que des clichés, même utilisés parodiquement.

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Une bouteille à la mer

Jeudi 9 février 2012

Réalisé par Thierry Binisti

Sorti en Corée du Sud (Festival de Pusan) le 8 octobre 2011

Sortie en France le 8 février 2012

Plus que l’histoire d’une idylle, c’est celle d’une amitié qui est contée, entre une Israélienne de 17 ans, d’origine française, installée à Jérusalem, et un Palestinien de 20 ans, jamais sorti de Gaza. Ils ne se parlent que par le courrier électronique et ne se rencontrent jamais (un seul plan les montre, chacun dans une voiture, au moment où le garçon roule vers l’aéroport pour aller faire des études en France).

Le film, sottement doté d’un titre qui a déjà servi en 1999 aux États-Unis, est passable, un peu maladroit, et le deuxième long métrage d’un réalisateur de télévision. Son premier film était L’outremangeur, désolant navet avec Éric Cantona, en 2003.

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Anonymous

Vendredi 10 février 2012

Réalisé par Roland Emmerich

Sorti au Canada (Festival de Toronto) le 11 septembre 2011

Sortie en France le 4 janvier 2012

Ce film a été, en France du moins, massacré par la critique et boudé par le public. Mais je ne partage pas cet avis, et je ne pense pas non plus que Roland Emmerich soit un gâte-sauces ne fabriquant que des daubes. Cette mauvaise réputation lui vient de ses films précédents, qui relevaient du divertissement et ne devaient pas être pris au sérieux (c’était évident avec 2012 !). Or les films de divertissement ne sont pas déshonorants par principe.

Ici, Emmerich filme l’une des théories selon lesquelles l’acteur Shakespeare a servi seulement servi de prête-nom à un aristocrate talentueux mais qui ne voulait pas signer ses pièces de son nom trop illustre, et il prend le parti qui les attribue à Edward De Vere, comte d’Oxford, théorie défendue par Freud – il en existe une autre, publiée en France le 1er janvier 1951 par un certain Bonac-Melvrau, sous le titre Défense de Will, soutenant que le vrai Shakespeare était Francis Bacon, le philosophe, contemporain du dramaturge, pas le peintre du vingtième siècle (le pseudo de l’auteur, Bonac, étant une anagramme de Bacon), et fondée sur l’analyse des textes publiés du vivant de Shapespeare.

Le film navigue entre plusieurs époques, et le même personnage est joué par deux acteurs différents, ce qui rend difficile de suivre l’histoire. Mais peu importe, elle est foisonnante et richement illustrée, et l’on peut y prendre un certain plaisir, même si... l’on n’y comprend rien ! Là encore, c’est un divertissement, et il ne faut pas y voir autre chose.

Vanessa Redgrave joue la reine Elizabeth dans son âge avancé, et le comte d’Oxford jeune est interprété par Jamie Campbell Bower, beau jeune homme qui tenait un petit rôle dans Sweeney Todd, le diabolique barbier de Fleet Street.

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La vérité si je mens 3

Mardi 14 février 2012

Réalisé par Thomas Gilou

Sortie en France et en Belgique le 1er février 2012

Rien ne va plus : ce film ne fait jamais rire. Comme dans le précédent épisode, il s’agit de rouler un arnaqueur, via une combine ingénieuse (mais qui ne fonctionnerait jamais dans la réalité !), en l’incitant à investir dans l’achat de 800 000 paires de chaussures fabriquées en Chine. Or le bateau ne livre à Marseille que des pieds gauches, et l’investisseur abandonne la cargaison, qui est revendue aux enchères par la douane. Bien entendu, la bande venue du Sentier la rachète... pour un euro. Pendant ce temps, un autre bateau livre au Havre les pieds droits. Même scénario, et voilà 800 000 paires de chaussures acquises pour deux euros. L’arnaqueur est ruiné et la bande des cinq devient riche une fois de plus.

Les acteurs se démènent, crient et gesticulent, autant sur l’écran que dans la campagne de promotion qui a précédé la sortie du film, mais ils sont bien les seuls.

Au fait, pourquoi la pub veut-elle nous faire croire que le quartier du Sentier n’est plus dans la course ? Il se trouve à deux pas de chez moi, j’y passe souvent, et rien n’a changé !

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King Kong

Mercredi 15 février 2012

Réalisé par Ernest B. Schoedsack et Merian C. Cooper

Sorti aux États-Unis le 7 mars 1933

Sortie en France le 29 septembre 1933

Le premier, le seul bon, réalisé en noir et blanc peu après le début du cinéma parlant, et sans le poindre trucage numérique, bien entendu, puisque l’informatique n’existait pas. Le singe énorme était en réalité une figurine de trente centimètres, animée image par image. C’est à la fois splendide et poétique, et cela renvoie dans les abîmes du ridicule les deux remakes qui en ont été faits.

La copie est bonne sans être parfaite, et mériterait une restauration comme celle dont vient de bénéficier La grande illusion, qui ressort aujourd’hui. La projection est excellente, et respecte le format d’origine, au point que les coins arrondis de l’écran subsistent, ce qu’on ne voit plus jamais en salles !

Dans toute la France, le film ne passe que deux fois cette semaine, au Brady, à Paris. Et, une fois de plus, j’étais l’unique spectateur. Ce qu’on appelle « une séance privée ».....

En bref : reprise. Chef-d’œuvre.Haut de la page

Spielberg et la comédie musicale

Vendredi 17 février 2012

Dans une interview donnée à Patrick Cohen, de France Inter, et que la station a diffusée pour faire un peu de promotion à son prochain film, Cheval de guerre (qui sortira mercredi prochain), Steven Spielberg révèle qu’il rêve de mettre en scène une comédie musicale. Or voilà des années que je prétends qu’il est le seul à pouvoir le faire. Deux séquences le prouvent : celle d’ouverture dans Indiana Jones et le temple maudit, et la scène du bal dans 1941. Elles sont parfaites, revoyez-les, vous comprendrez.

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La grande illusion

Vendredi 17 février 2012

Réalisé par Jean Renoir

Sortie en France le 4 juin 1937

Le chef d’œuvre de Jean Renoir (pour lequel Françoise Giroud était script-girl) est ressorti avant-hier, dans une copie restaurée, tirée d’après un négatif d’origine qui se trouvait à la Cinémathèque de Toulouse. L’image est donc impeccable.

Je me permets toutefois de faire une réserve : le film serait bien meilleur si Renoir n’avait pas voulu le terminer par un épisode qui jure avec tout le reste, quand Gabin et Dalio, officiers français qui se sont évadés d’un camp de prisonniers, se réfugient dans une ferme allemande tenue par une femme seule, laquelle a ensuite une histoire d’amour avec le premier. L’actrice allemande Dita Parlo est d’ailleurs, avec une infirmière très épisodique, le seul personnage féminin de l’histoire, mais sa présence n’a aucun intérêt : après l’évasion réussie et le flingage de Pierre Fresnay par Erich von Stroheim, tout était dit.

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Du silence et des ombres

Lundi 20 février 2012

Réalisé par Robert Mulligan

Titre original : To kill a mockingbird

Sorti aux États-Unis le 25 décembre 1962

Sortie en France le 29 mai 1963

Vu la considération que je porte habituellement à Robert Mulligan, estimable réalisateur de L’autre et d’Un été 42, je n’aurais pas cru être capable de partir avant la fin d’un de ses films ! Mais là, j’ai dû rendre les armes.

Non seulement ce film est d’une lenteur exaspérante et ne nous fait entrer au cœur de l’intrigue qu’au bout d’une heure (une séquence de procès pour viol intenté à un Noir par une Blanche qui avait tenté, sans succès, de le séduire), mais il est trop long, ou plutôt rallongé : après le procès, tout à fait traditionnel mais à la fin duquel, contre toute attente, l’accusé, pourtant bien défendu par un avocat qui a démontré son innocence, est condamné, on apprend qu’il a été abattu par la police au cours d’une tentative d’évasion. À ce stade, c’est suffisant, l’histoire pourrait s’arrêter là, mais elle continue, avec une scène de condoléances, puis une fête de village après laquelle les deux enfants de l’avocat sont victimes d’une agression, etc. C’est crispant, on se dit qu’un deuxième film commence, et l’on abandonne.

Gregory Peck joue un avocat, comme dans Le procès Paradine, comme dans le premier Cape Fear (celui de 1960, pas le navet de Scorsese). Ailleurs, il a été médecin, plusieurs fois officier, journaliste, mais jamais ouvrier ou paysan ! Comme toujours, il promène sa nonchalance et dit un mot tous les quarts d’heure, ce qui a dû beaucoup inspirer Marlon Brando. Truffaut a dit de lui qu’il était « creux et [n’avait] aucun regard ». Pas faux...

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Cheval de guerre

Vu le jeudi 19 janvier 2012 - Sorti le mercredi 22 février 2012

Réalisé par Steven Spielberg

Titre original : War horse

Sorti aux États-Unis le 4 décembre 2011

Sortie prévue en France le 22 février 2012

Très beau film de Spielberg, sans doute son meilleur depuis Empire du Soleil. Voir la critique complète ici.

Et les deux principaux personnages ci-dessous, dans un paysage du Devon :

 

War horse

 

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Il était une fois, une fois

Jeudi 23 février 2012

Réalisé par Christian Merret-Palmair

Sorti en France (Festival de l’Alpe-d’Huez) le 15 janvier 2012

Sortie en France et en Belgique le 15 février 2012

Un festival de blagues sur les Belges, mis au service d’un scénario pas bête du tout sur une escroquerie qu’a imaginée une intrigante : un faux couple princier appartenant à la famille royale belge va voler des bijoux dans un grand hôtel parisien, à la faveur d’une réception. Mais les deux imposteurs tombent sur un invité à qui on ne la fait pas, Stéphane Bern en personne ! Prêt à les démasquer en public, le cher Stéphane est neutralisé (avec un taser !), et le vol peut se poursuivre. Mais la fin sera morale, et même sentimentale.

On prend plaisir à cette joyeuse pochade, mieux imaginée par les deux scénaristes que leur précédente œuvre commune, ce navet qu’était The prodigies.

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La mer à boire

Vendredi 24 février 2012

Réalisé par Jacques Maillot

Sorti en France (Festival des Arcs) le 16 décembre 2011

Sortie en France le 22 février 2012

Le type même du film dont le projet, louable au départ (une histoire sociale sur la ruine des petites et moyennes entreprises), est massacré par un scénario ridicule et une réalisation stupide.

Premier grief : je n’ai rien contre le principe de montrer un bon patron, assez humain pour réduire son propre salaire et ne plus percevoir que le SMIC, perdre la partie contre ceux des ouvriers qu’il est obligé de licencier s’il ne veut pas faire faillite et mettre au chômage tous les autres, car c’est une réalité que tout le monde connaît. Mais montrer en face de lui des ouvriers aussi obtus et malfaisants, par exemple celui qui sabote le dernier bateau fabriqué par la firme, très coûteux, déjà vendu, et que l’entreprise devra rembourser à son acheteur (et les assurances ?), c’est un peu beaucoup !

Deuxième grief : à trois ou quatre reprises, on insère dans le récit des scènes de nu, et même une de copulation, aussi racoleuses que superflues.

Troisième grief : Pierret, le patron, malgré ses difficultés financières puisqu’il est déjà endetté, a prêté dix mille euros à un ami au bord de la ruine. Peine perdue, l’entreprise de l’ami est mise en liquidation judiciaire. Il remercie et rend donc à Pierret le chèque devenu inutile. À cet instant, le spectateur se dit que le personnage va certainement se suicider. Et cela ne rate pas : moins d’une minute après, il s’immole par le feu. Truc de scénariste. On joue beaucoup sur les trucs, chez les scénaristes français.

Quatrième grief : un homme d’affaires russe (d’où sort-il ?) s’intéresse à l’entreprise de fabrication de bateaux de Pierret, il est prêt à y investir deux millions d’euros, mais Pierret doit aller discuter à Moscou avec son directeur financier. Le patron français débarque donc dans la capitale russe, n’y trouve pas l’oligarque parce que celui-ci est en fuite et recherché par la police, et entame une histoire d’amour avec son interprète, visitant la ville, faisant du patin à glace, passant la nuit avec elle, etc. Un deuxième film qui commence ? Le premier est perdu de vue ? Cet épisode ne joue aucun rôle dans le récit, c’est une parenthèse qui ne fait que le surcharger.

Cinquième grief : Pierret s’est fait voler son entreprise par ses créanciers. Il va se promener sur le port, voit amarré un bateau qu’il a construit, est invité par le propriétaire à faire une balade en mer, mais l’homme fait une plaisanterie grasse sur l’homme qui s’est immolé précédemment par le feu et qui avait fabriqué une pièce du bateau. Ulcéré, Pierret le frappe à coups de couteau et jette son cadavre à la mer. Le film s’arrête là.

À ce stade, je crois qu’il n’est pas utile de préciser que, si le bateau flotte toujours, le film a sombré depuis longtemps.

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Césars : avec des Sy...

Samedi 25 février 2012

J’aime bien Omar Sy, comme tout le monde. Il est sympathique, toujours gai, on a plaisir à le voir... à la télévision pendant deux minutes. Mais que l’Académie des Césars l’ait récompensé de préférence à Jean Dujardin, ou même à son partenaire François Cluzet, c’est parfaitement ridicule. Dujardin a joué des tas de rôles différents, dans le drame comme dans la comédie, Cluzet aussi, et ils ont prouvé qu’ils étaient de véritables acteurs. Ce que fait Dujardin dans The artist, notamment, montre aussi qu’il travaille. Omar, à l’écran, est ce qu’il est dans la vie, et être acteur, ce n’est pas cela.

En réalité, cette distinction est politiquement correcte : on a voulu récompenser un Noir, ce qui n’avait jamais été fait. C’est de la discrimination positive.

En revanche, je suis plutôt satisfait qu’on ait songé à distinguer Bérénice Béjo, complètement laissée de côté depuis que son film fait tant de bruit à Hollywood ; et qu’Intouchables et La guerre est déclarée, ces médiocres films, aient fait un semi-bide.

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Cannes ou la ringardise

Dimanche 26 février 2012

Une preuve supplémentaire que les sélectionneurs du Festival de Cannes ont autant de flair d’une huître enrhumée : le chef d’œuvre iranien Une séparation, qui a été choisi par le public de France Inter comme le meilleur film étranger pour l’année 2011, de préférence à la Palme d’Or et autres prix qu’on avait donnés dans ce festival à des films surfaits dont j’ai écrit le plus grand mal (cherchez un peu) et qui n’ont pas eu tellement de succès, avait été proposé à la sélection par son distributeur pour la France, et il avait été... refusé ! Estimé acceptable, mais sans plus, on lui offrait au mieux une petite place, éventuellement, dans la section Un certain regard, qui ne rameute pas les foules, on doit bien le reconnaître. Alors que le film avait déjà été sélectionné au festival de Berlin, où il a fait un triomphe, s’est vendu dans le monde entier en vingt-quatre heures, et seuls quelques critiques français lui ont fait la gueule.

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Cinq Oscars pour... Harvey

Lundi 27 février 2012

On ne va pas jouer les pisse-froid et dénigrer The artist, qui est un bon film et a décroché cette nuit cinq Oscars à Hollywood : meilleurs film, réalisateur, vedette masculine, costumes et musique (on oublie trop souvent la musique, or elle est primordiale ici). Par comparaison, apparaît le manque de discernement de l’Académie des Césars, en France, qui a préféré Omar Sy à Jean Dujardin, absurdité apothéosique.

Néanmoins, et sachant qu’aux États-Unis on déteste la France et les Français, jamais The artist n’aurait reçu la moindre récompense s’il n’avait pas été tourné à Hollywood et distribué par Harvey Weinstein. Si vous ne connaissez pas Harvey (et son frère Bob), vous ne connaissez rien au cinéma hollywoodien. Ces deux hommes, qui ont fondé leur compagnie de production-distribution et l’ont baptisée Miramax, d’après le prénom de leurs parents (elle a changé de nom depuis), connus pour adorer le cinéma mais pratiquer des méthodes de gangsters, passent leur vie à exercer des pressions parfois violentes sur tout ce qui a droit de vote et moyens de financement aux États-Unis. On ne leur résiste pas, c’est impossible, leur campagne électorale est incessante et emploie tous les moyens ; si bien qu’ils ont ramené... 86 Oscars ! Moralité : si vous avez les Weinstein avec vous, tous les espoirs vous sont permis, si vous les avez contre vous, votre carrière est quasiment terminée.

Je vous conseille de lire les deux livres de Peter Biskind, où leurs noms reviennent sans cesse, parmi des centaines d’anecdotes qu’on ne trouve nulle part ailleurs : Le nouvel Hollywood et Sexe, mensonges et Hollywood, disponibles en format de poche, donc pas chers. C’est aussi saignant que révélateur. Certaines vedettes, comme Matt Damon dont ils ont fait la carrière, lècheraient les pieds des frères Weinstein.

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Dos au mur

Lundi 27 février 2012

Réalisé par Asger Leth

Titre original : Man on a ledge

Sorti en Argentine, Croatie, Allemagne, Grèce, Israël, au Pérou et au Portugal le 26 janvier 2012

Sorti en France le 15 février 2012

Premier long métrage d’un Danois qui n’avait réalisé qu’un documentaire, ce film surprend par son excellente réalisation et son scénario soigné, dû à un Vénézuélien qui n’avait écrit jusqu’ici que pour la télévision, Pablo F. Fenjves.

Nick Cassity profite des (fausses) obsèques de son père pour s’évader ; il avait été condamné pour le vol d’un énorme diamant, subtilisé en réalité par... son propriétaire, un magnat richissime qui flouait ainsi les assurances. Grimpé au vingt-et-unième étage d’un grand hôtel de New York, il menace de sauter dans le vide depuis la corniche mentionnée par le titre original, mais ce n’était qu’une manœuvre destinée à occuper la police, pendant que son frère cambriole l’immeuble voisin, propriété de l’escroc, dans l’espoir de dénicher le fameux diamant (déception, soit dit en passant, le bijou ressemble à un énorme bouchon de carafe et ne jette nul feu !).

Tout se terminera bien, et une histoire d’amour va sans doute s’ébaucher entre le faux coupable et la très belle négociatrice de la police, tandis que le frère (excellent Jamie Bell) demande en mariage sa petite amie !

La séquence de l’évasion est remarquable, et le réalisateur a l’intelligence de ne pas jouer sur les effets propres à flanquer le vertige au spectateur. Tout cela relève du bon divertissement.

En bref : à voir.Haut de la page

La vie d’une autre

Mercredi 29 février 2012

Réalisé par Sylvie Testud

Sorti en France le 15 février 2012

Encore un membre de cette redoutable profession, celle des acteurs, qui s’estime capable de passer à la mise en scène, ce qui réussit une fois sur dix, les deux métiers étant complètement différents. Sylvie Testud est une bonne actrice, mais elle ferait mieux de s’en tenir à ce qu’elle sait faire. Comme Jalil Lespert, Daniel Auteuil et tant d’autres.

Comme la première moitié est assez amusante, avec cette femme qui se réveille amnésique, ayant tout oublié des quinze années précédentes et qui doit tout découvrir, on peut toutefois voir cette partie, à condition de s’en aller dès que ça se gâte, avant la scène sur le bateau-mouche, totalement ratée, et où le récit tombe dans la sentimentalité. La perspective de voir ce couple au bord du divorce envisager de recommnencer à s’aimer est un redoutable cliché, et l’intérêt disparaît alors pour tourner à la consternation.

En bref : à voir à la rigueur.Haut de la page

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