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JPM - Films vus - Notules -  Mai 2015

Notules - Mai 2015

 

Plus courtes que les critiques, les notules traitent d’un ou plusieurs films, ou de sujets d’actualité en rapport avec le cinéma. Jusqu’en septembre 2004, elles provenaient de divers forums aujourd’hui disparus. Par la suite, elles s’en affranchissent et sont rédigées directement ici.

Œuvres citées : Un jeune poèteLe tournoi – Othello – My old lady – Three weeks after Paradise – Every thing will be fineTitli, une chronique indienneTitliGente de bienLeopardi il giovane favolosoLe talent de mes amisGoog night MommyIch veh ich veh – The other – Comme un avionParfums d’AlgerUne femme iranienneAynehaye RooberooSan Andreas – 2012 – Tremblement de terre – Vertigo – Irvin Yalom, la thérapie du bonheurYalom’s cure

Personnes citées : Damien Manivel – Élodie Namer – Orson Welles – Gene Kelly – Alain Masson – Israël Horovitz – Maggie Smith – Kristin Scott Thomas – Jane Birkin – Kevin Kline – Wim Wenders – James Franco – Kanu Behl – Franco Lolli – Mario Martone – Giacomo Leopardi – Alex Lutz – Bruno Sanches – Tom Dingler – Veronika Franz – Severin Fiala – Robert Mulligan – Rachid Benhadj – Isabelle Adjani – Biyouna – Monica Bellucci – Guerritore – Tarek Ben Ammar – Negar Azarbayjani – Shayesteh Irani – Brad Peyton – James Stewart – Sabine Gisiger

Un jeune poète

Lundi 4 mai 2015

Réalisé par Damien Manivel

Sorti en Suisse (Festival de Locarno) le 10 août 12014

Sorti en France le 29 avril 2015

Premier long-métrage du réalisateur, après trois courts, dont un qui précède au programme le présent film, avec le même interprète, et qui n’est pas plus explicite. À dix-huit ans, Rémi, qui semble n’avoir ni famille ni métier, erre dans la ville de Sète – apparemment déserte, en plein été ! –, rencontre quelques personnes, fait un peu de plongée sous-marine, et s’enivre à la vodka, puis va vomir dans un caniveau. Sa principale occupation semble d’écrire des vers, mais ce qu’on peut en entendre montre que ce sont de plates niaiseries que nul n’appréciera jamais. De temps à autre, il se rend au cimetière et parle longuement à une tombe, celle de Paul Valéry (jamais nommé, néanmoins on l’identifie si on connaît l’endroit), qui paraît lui répondre, dans la scène finale, par des inscriptions s’inscrivant sur l’écran en lettres blanches sur fond bleu comme le ciel, et dont il tire la conclusion : tout ce qu’il produit, ce ne sont que des mots sans importance, et il ne fera jamais rien de valable.

La réalisation est parfaite : plans fixes, cadrages impeccables, beau paysages méditerranéens. Mais on se demande où va le film. Nulle part, probablement. Heureusement, c’est court.

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Le tournoi

Mardi 5 mai 2015

Réalisé par Élodie Namer

Sorti aux États-Unis (COLCOA Film Festival) le 21 avril 2015

Sorti en France le 29 avril 2015

Mais qu’a donc voulu faire la réalisatrice ? Un documentaire – très romancé, à la limite de l’imposture – sur les échecs et la compétition ? Ce serait ignorer qu’en France, ce jeu n’a guère de public, et intéresse assez peu. Un brûlot féministe, qui tente de démontrer que, si les joueuses d’échecs sont si peu nombreuses, ce n’est pas parce que les femmes manquent d’intelligence, mais parce qu’on leur a bourré le crâne dès l’enfance pour leur faire admettre que leur cerveau ne convient pas à ce jeu ? Puéril, inutile.

On a donc fabriqué un huis-clos, un championnat censé se dérouler en une semaine dans un grand hôtel de Budapest (en fait, les intérieurs ont été réalisés... à Deauville !). Et tout cela est vu par un jeune homme, Cal, pas formidablement sympathique – on a envie de le boxer dès sa première apparition – champion de France de la spécialité, mais qui va tomber sur un bec, sans quoi il n’y aurait pas de film. Ce bec, c’est un adversaire aussi inattendu qu’invraisemblable : Max, un enfant de huit ans, que nul ne connaît, dont les parties antérieures n’ont été archivées nulle part, qui n’a pas d’entraîneur, joue à sa fantaisie, et annonce d’emblée qu’il va ratatiner Cal, que pourtant il admire ! On voit comme ce scénario est solide et documenté...

La réalisatrice, qui était, avant ce premier film, scénariste de séries télévisées, ne connaissait visiblement pas les échecs – elle ne montre rien des parties – ni à la mentalité des joueurs. C’est pourquoi elle se perd dans une litanie de clichés jeunistes (beuveries, partouzes, joueurs d’échecs idiots, ce qui est un comble sachant le niveau d’intelligence qu’exige ce jeu, et dépravés pour bien souligner qu’ils sont jeunes, le tout accompagné d’une musique techno atroce), jouée par des acteurs peu compétents, à commencer par l’acteur principal, beau garçon mais qui débute lui aussi, et auquel on ne prédit pas une longue carrière.

Je ne relève que quelques détails, une bonne idée, et quatre très mauvaises.

La bonne idée relève de la mise en scène : on repère immédiatement l’adversaire futur de Cal, le petit Max, car, dans cette assemblée d’hommes vêtus de couleurs ternes, il est le seul à porter un blouson d’un jaune éclatant – vert par la suite – et à se déplacer sur des patins à roulettes.

Les quatre mauvaises idées sont, d’abord, la première apparition de Cal en compétition : totalement ivre, il s’endort sur l’échiquier, parce qu’il a parié de boire une bouteille entière de tequila avant la partie ! De qui se moque-t-on ? Puis cette intrusion de Cal dans la chambre de Max, parce qu’il cherche à le « comprendre » : il farfouille dans ses jouets, feuillette un album des Schtroumpfs, enfin s’endort sur son lit, d’où l’expulsera une femme de chambre. Comportement que rien ne justifie. Ensuite, cette scène dans la baignoire, avec sa petite amie : ils sont nus, et elle parie de le faire jouir en moins de deux minutes. Elle commence les manœuvres nécessaires, mais il la repousse très vite et sort de la baignoire. Cela se veut audacieux, c’est seulement racoleur. Soit dit en passant, je ne crois pas qu’un réalisateur masculin aurait eu une idée pareille. Enfin, la scène finale : Cal et Max s’affrontent dans une partie d’échec décisive, l’enfant donne beaucoup de fil à retordre à son adversaire, mais celui-ci finit par redresser la situation (je répète qu’on ne voit jamais le plateau du jeu et qu’on ignore tout des mouvements de la partie, ce qui doit être très frustrant pour les spectateurs connaisseurs), mais, au moment de jouer son dernier coup qui va lui donner la victoire, il abandonne, la laisse au petit garçon et s’en va en souriant ! Aucun joueur professionnel n’agirait ainsi...

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Les cent ans d’Orson Welles

Mercredi 6 mai 2015

Aujourd’hui 6 mai 2015, s’il avait vécu, Orson Welles aurait eu cent ans. Mais avez-vous lu ou entendu dire qu’en France, quelqu’un, hors de ce site, s’en soit souvenu ? Aucun de ses films n’est programmé aujourd’hui, seul Othello passera à la Cinémathèque... le 28 juin !

 

Orson Welles dans "Le troisième homme"

 

Cet oubli me rappelle celui qui avait marqué le centenaire, le 23 août 2012, de la naissance de Gene Kelly. Je venais de lire sa remarquable biographie par Alain Masson, ouvrage paru le 9 février de cette année-là. Et, voyant approcher ce centenaire, j’avais cherché à savoir si, à Paris, la ville au monde qui compte le plus grand nombre de salles de cinéma, la seule ville au monde où TOUS les films sortent, on commémorerait cet évènement.

Eh bien, non, j’ai été bredouille. Téléphonant à la Cinémathèque Française, je suis tombé sur un employé qui ignorait tout de Gene Kelly, et ne put me dire que ceci : en août, la Cinémathèque est en vacances ; de toute façon, le programme est fixé des mois à l’avance, et nul n’y avait songé à ce centenaire tout à fait négligeable.

Je me suis rabattu sur le Forum des Images, organisme municipal proche de chez moi, au Forum des Halles. Même résultat, on n’avait rien prévu au sujet de Gene Kelly.

Finalement, j’avais été le seul à y penser ! Ce sera pareil pour Orson Welles, apparemment.

Je ne vise naturellement que les entreprises de spectacle françaises, publiques ou privées. Les chaînes de télévision étrangères, c’est différent, TCM, Paramount Channel et Arte ne sont pas restées amorphes.

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My old lady

Jeudi 7 mai 2015

Réalisé par Israël Horovitz

Sorti aux États-Unis le 10 septembre 2014

Sorti en France le 6 mai 2015

Connu mondialement pour ses pièces de théâtre, Israël Horovitz fait ici, à 75 ans, son premier film de long-métrage, après un moyen-métrage en 2002, Three weeks after Paradise. Il a tourné son film à Paris, très bien montré ici. Son personnage central vient de New York, c’est Mathias, qui a cinquante-deux ans, et qui, fauché, croit recueillir à Paris l’héritage de son père défunt : un immense appartement dans le Marais – en réalité, on a tourné aux Gobelins. Hélas, le défunt avait vendu l’appartement à une dame, Mathilde Girard, dont on apprendra qu’il avait été l’amant, alors qu’il était marié avec une autre femme. Cette Mathilde, nonagénaire et dérangée par cet intrus, le reçoit mal, n’accepte de le loger que s’il paye un loyer (elle lui soutire sa montre en or, puisqu’il n’a pas d’argent), et lui révèle qu’elle vendu ces locaux en viager à son père, donc il ne les récupèrera qu’à sa mort ! Outre cela, elle a une fille, Choe, encore plus hostile. Mais on se doute bien que les choses vont s’arranger, avec même une histoire d’amour entre Mathias et Chloe, histoire à laquelle on ne croit pas beaucoup, malheureusement.

Bref, l’histoire est une comédie très conventionnelle, qui sent sa pièce de théâtre fondée sur un drame familial, mais qui est sauvée par la beauté de la photo et par ses trois interprètes de langue anglaise, Maggie Smith, Kristin Scott Thomas (on a échappé à Jane Birkin, laquelle devait tenir le rôle !) et Kevin Kline. Il y a aussi quelques acteurs français, qui tiennent des rôles très secondaires. Mais, tel quel, le film donne assez de plaisir pour qu’on ne fasse pas la fine bouche.

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Every thing will be fine

Lundi 11 mai 2015

Réalisé par Wim Wenders

Sorti en Allemagne (Festival de Berlin) le 20 février 2015

Sorti en France le 22 avril 2015

Pour avoir accidentellement provoqué la mort d’un enfant de cinq ans, Tomas, qui tente d’être écrivain, essaie de se suicider, et se rate. La mère de l’enfant admet qu’il n’est pas responsable, et tous deux entament une relation amicale mais superficielle. Puis Tomas, rongé par le remords, utilise ce malaise pour trouver l’inspiration de ses livres, et... devient un écrivain à succès !

Huit ans plus tard, Christopher, le frère de la petite victime, qui a maintenant seize ans, le contacte pour lui dire qu’il admire ses livres et veut le rencontrer pour avoir des conseils, car lui aussi désire écrire. Réticent, Tomas finit par accepter, mais montre qu’il ne désire pas poursuivre ce type de relation, et accepte seulement de lui signer la totalité des livres qu’il a publiés. Christopher, alors, se venge en s’introduisant chez lui et en... pissant sur son lit. Puis il lui rend visite de nouveau, et Tomas, rendu moins arrogant et moins égoïste, pense voir en lui le fils qu’il n’a pas eu, puisqu’il est stérile, tandis que Christopher voit en lui une sorte de père. Comme quoi la recette de la rédemption était bonne, et je la conseille à tous. Fin du film.

Ce scénario ridicule, dont on ne sait quel but il vise (les relations familiales compliquées, comme dans TOUS les films actuels ? La genèse du travail littéraire ? Le poids de la culpabilité ?), est compensé par une mise en scène efficace, et surtout une bonne interprétation de James Franco dans le rôle principal.

Mystérieusement, on nous dit que le film a été réalisé en 3D, or on voit mal pourquoi. Mais peu importe. Ce qui importe, c’est que ce film met en évidence la raison pour laquelle je n’ai jamais aimé Win Wenders, que je trouve suprêmement ennuyeux alors que tout le monde voit en lui une sorte de génie. C’est que Wenders en fait trop, imagine des scènes trop longues et fabrique des plans qui durent au-delà du nécessaire. Deux exemples : la scène d’introduction avec les pêcheurs qui campent dans la neige ne sert absolument à rien, car elle ne révèle aucun détail sur Tomas. Plus tard, une autre scène est encore plus révélatrice : le facteur livre le courrier chez Tomas, et on voit tomber dans la boîte un gros paquet plus deux ou trois lettres. Tomas, dans le salon, assez loin de la porte, entend le bruit. La caméra le suit alors, traversant tout l’appartement, ramassant le courrier, l’apportant dans son bureau et ouvrant la lettre de Christopher. Mais à quoi sert ce luxe de détails ? On pouvait se contenter de filmer la fin, la lecture de la lettre, sans nuire à la compréhension de la séquence. Monté plus court, le film gagnerait dix bonnes minutes.

Mais faire long, c’est la maladie actuelle de la totalité du cinéma mondial. Autrefois, beaucoup de films duraient une heure et quart, et disaient tout ce qu’il y avait à dire.

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Titli, une chronique indienne

Mardi 12 mai 2015

Réalisé par Kanu Behl

Sorti en France (Festival de Cannes) le 20 mai 2015

Sorti en France le 6 mai 2015

Sa mère, qui désirait une fille, a donné à son troisième fils un prénom féminin, Titli, qui signifie papillon : c’est évidemment une métaphore, puisque le personnage central va changer d’état en cours de récit, mais pas dans le sens du bien. Puis elle est morte, et le garçon a été élevé par un père plutôt absent (il passe tout son temps devant la télévision) et par ses deux frères aînés, qui sont d’affreux voyous. Si l’Inde est censée le pays de la non-violence, ils font mentir cette fable, vivent de vols, et ne reculent pas face à la perspective de toucher un salaire comme tueurs à gages. Titli rêve de leur échapper en faisant d’abord l’acquisition d’un scooter, puis en investissant dans un parking en construction, avec un argent... qu’il n’a pas. Mais les deux frères le marient de force avec une fille, Neelu, qui ne veut pas de lui, qui a déjà un amant marié lui promettant sans cesse de divorcer, et qui accepte, si Titli favorise son futur mariage, de lui donner le montant de sa dot, laquelle tomberait à pic. Mais tout va tourner assez mal, et Titli renonce à son projet de parking, tandis que la fille renonce à son mariage d’amour, car l’amant l’a menée en bateau. Les deux défavorisés partent ensemble sur le fameux scooter.

Pour tout dire, en épilogue du scénario assez fort de ce premier film (le réalisateur avait d’abord fait un documentaire), cette fin est niaise et gâte la bonne impression qu’il faisait jusque là, grâce au tableau sans complaisance de ce pays en pleine expansion : corruption, violence, avidité, marginalisation des pauvres, mais aussi, émergence du pouvoir des femmes, qui ne se laissent plus faire. Néanmoins, je n’ai pas compris à quoi rimait cette obsession du brossage de dents chez les personnages masculins !

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Gente de bien

Mercredi 13 mai 2015

Réalisé par Franco Lolli

Sorti en France (Festival de Cannes) le 18 mai 2014

Sorti en France le 18 mars 2015

Morne film. Lorsque vous en sortez, vous cherchez un bus. Pas pour rentrer chez vous, mais pour vous jeter dessous !

Bref, Eric, âgé de dix ans, doit se séparer momentanément de sa mère qui a trouvé un travail ailleurs, et aller vivre avec son père menuisier, Gabriel. Or, divorce aidant, il le connaît peu. Il aurait ses chances avec Maria Isabel, une brave femme sans soucis financiers, qui emploie Gabriel afin de restaurer ses meubles, mais la famille de Maria Isabel accepte mal la présence de ce garçon. Il finit par retourner chez son père, à Bogotá. Puis sa chienne bien-aimée meurt d’un cancer !

Le réalisateur fait ici son premier film, après deux courts-métrages (il a étudié en France). De toute évidence, il vise un but social, et son personnage féminin lui sert à fustiger une certaine forme de charité irresponsable, croit-il. Mais justement, ce but, il le rate lamentablement, car on ne comprend pas les rebuffades que le petit garçon adresse à une brave femme qui est la seule à se soucier de lui. Condescendance ? On n’en voit nulle trace.

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Leopardi il giovane favoloso

Mercredi 13 mai 2015

Réalisé par Mario Martone

Sorti en Italie (Festival de Venise) le 1er septembre 2014

Sorti en France le 8 avril 2015

Le titre signifie « Leopardi le jeune fabuleux ».

Né en 1798 dans une famille noble de Recanati, donc en province, Giacomo Leopardi étouffe sous la férule de parents rigoristes et religieux, alors que lui-même est athée. Son père l’oblige, lui, son frère et sa sœur, à une étude incessante dans la bibliothèque familiale très fournie. Pour ne rien arranger, Giacomo est atteint d’une maladie des os qui va, au fil des années, le rendre diforme et l’obliger à se déplacer à l’aide d’une canne. Il compense en écrivant de la poésie et ambitionne d’accéder à la célébrité. Il y parviendra en quittant sa famille, grâce à deux amis.

Presque tout le film est sonorisé avec des citations de Leopardi, mais le film, qui pourrait en devenir austère, échappe néanmoins à ce handicap, notamment grâce à la beauté des prises de vue. Pourtant, l’interprète du personnage ne ressemble pas du tout à Leopardi.

Il n’y a pas de fin, on n’apprend donc rien sur le poète après sa décision de quitter Naples, où un ami l’a emmené, et de retourner vers la maison familiale. Mais ce n’est pas un documentaire, de toute évidence, c’est uniquement le récit de l’évolution d’un esprit à part.

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Le talent de mes amis

Vendredi 15 mai 2015

Réalisé par Alex Lutz

Sorti en France le 6 mai 2015

Serait-ce un indice ? Ce film, histoire de trois ratés qui s’ignoraient, n’est sorti dans aucun pays étranger...

Sa signification – peu importe qu’on ne possède aucun talent, ça n’empêche pas de vivre agréablement, et l’obsession d’aller jusqu’au bout de soi-même afin de réussir est une ineptie récurrente –, cette signification est donnée peu avant la fin, dans une tirade qui est la seule occasion qu’aura Bruno Sanches de montrer un soupçon, justement, de talent, après avoir montré ses fesses sans la moindre nécessité. Pour le reste, j’avoue m’être plutôt ennuyé. Les personnages masculins passent leur temps à s’embrasser sur les deux joues et à dire « Putain ! », « C’est super » ou « Tu fais chier ». Alex Lutz a engagé un conseiller technique pour sa réalisation et recruté ses copains de Canal Plus, ce qui renvoie le film dans la redoutable catégorie des « films de potes » dont nous sommes submergés, mais que n’a-t-il aussi engagé un dialoguiste ?

Passé en un seul jour de la plus grande salle de Halles – cinq cents places – à une autre trois fois plus petite, je l’ai vu aujourd’hui dans une salle encore plus exigüe, où nous n’étions que quatre spectateurs. Alors, oui, Alex Lutz est bon comédien et a eu une bonne idée de départ, Tom Dingler se révèle et va sans doute devenir vedette, mais rien de plus.

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Goodnight Mommy

Lundi 18 mai 2015

Réalisé par Veronika Franz et Severin Fiala

Tire original : Ich veh ich veh

Sorti en Italie (Festival de Venise) le 30 août 2014

Sorti en France le 13 mai 2015

Je commençais à être inquiet : nous sommes déjà à la mi-mai, et on n’avait pas encore trouvé le film le plus con de l’année. Eh bien, c’est chose faite. Et le film s’attribue, en même temps et pour la France, un Titre À La Con, en anglais et n’ayant rien à voir, ni avec le sujet, ni avec le titre original, qui signifie en allemand « Je vois je vois », ou « Je vois que je vois » (sic)...

C’est tout de même marrant, cette inculture : personne ne semble avoir vu le plagiat. Et si les critiques n’en parlent pas, c’est parce que ce minuscule détail n’est pas mentionné dans le dossier de presse ! À l’origine, le chef-d’œuvre de Robert Mulligan, The other : tout y est, les deux jumeaux, le Bon et le Méchant. Ce dernier, avant le début du récit, est mort d’un accident, et le Bon prend sa personnalité et continue ses méfaits, incluant, autre « emprunt », l’assassinat d’un chat. À la fin, un incendie – provoqué – tue les survivants du drame. Auparavant, on aura bien ri à la vue des horreurs que les deux (?) garçons ont fait subir à leur mère, sous le prétexte qu’ils ne la reconnaissent pas. Un sommet de comique involontaire.

C’est réalisé avec soin, mais le scénario est ridicule. Je conseille la scène où les garçons collent les lèvres de la mère avec de la colle forte. Ensuite, pour qu’elle puisse manger, ils utilisent des ciseaux, et le sang jaillit partout. Le film de Mulligan contait une histoire encore plus horrible, mais, très subtil, il ne montrait rien. Mais Mulliga était un maître. Les deux réalisatrices de ce machin sont, elles, des gâte-sauces.

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Comme un avion

Mercredi 20 mai 2015 - Sortie prévue le 10 juin 2015

Réalisé par Bruno Podalydès

Sortira en France le 10 juin 2015

La première moitié est assez cocasse : Michel, passionné des anciens avions (comme Spielberg), n’a pourtant jamais voyagé ainsi et n’en a pas envie. Mais, à partir d’une discussion sur les palindromes, il découvre que le mot kayak, non seulement EST un palindrome comme sexes ou ressasser, mais que la silhouette de l’objet ressemble assez à celle d’un avion. Du coup, il en achète un en kit, sur Internet, réussit à le monter bien que ce soit plus difficile qu’avec les meubles Ikea, et part en voyage sur une rivière de sa région, pour une semaine, sous l’œil sceptique et ironique de sa femme.

La seconde moitié du film déçoit un peu, car c’est le monde actuel vu par des hippies attardés, et c’est beaucoup moins original. Mais enfin, les détails cocasses ainsi que la beauté des paysages compensent la banalité de l’inspiration. Et ce n’est (presque) jamais vulgaire, sauf une scène de nu – avec Agnès Jaoui – parfaitement supeflue, comme il y en a dans la plupart des films actuels.

Le réalisateur, cette fois, joue le rôle principal, et il n’y est pas mauvais. Hélas, Sandrine Kiberlain plombe les scènes, par chance peu nombreuses, où elle apparaît. Pourquoi cette actrice ne va-t-elle jamais chez le coiffeur, et s’obstine-t-elle à arborer cette tignasse décolorée, filasse, qu’elle ne peigne en aucun cas ? On rêve d’un réalisateur qui l’enverrait au maquillage avant de l’admettre devant une caméra.

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Parfums d’Alger

Samedi 23 mai 2015
Parfums d'Alger

Réalisé par Rachid Benhadj

Sorti nulle part !

D’abord, ne pas prendre au sérieux ce que dit Wikipédia, qui prétend, dans sa notice sur le réalisateur, qu’Isabelle Adjani et Biyouna (célèbre actrice algérienne) jouent dans le film. Elles n’y sont ni l’une ni l’autre ! En fait, le film n’est recensé ni sur Internet Movie Database, ni sur Allociné... La vérité est qu’Isabelle Adjani avait commencé le tournage à Alger, mais elle a quitté la production au bout de quatre jours, on ne sait pourquoi. Et le réalisateur, qui n’avait pas été prévenu, a fait constater par un huissier qu’elle s’était éclipsée après avoir touché quarante pour cent de son cachet de trois millions d’euros ! On a dû suspendre le tournage, puis on envisagea d’engager Monica Bellucci pour la remplacer, mais cela ne s’est pas fait non plus, et on a donné le rôle à Monica Guerritore. La belle Isabelle n’a fourni aucune explication, mais on a su qu’un désaccord avait éclaté entre elle et le réalisateur, qui n’avait pas accepté de se plier à ses célèbres caprices, dont celui-ci : elle aurait souhaité faire le film, en Tunisie, seule avec Tarek Ben Ammar, qui était coproducteur.

Pour en revenir au film tel qu’il existe, c’est l’histoire d’une femme algérienne prénommée Karima, qui a quitté son pays pour fuir la tyrannie de son père, et s’est installée à Paris, où elle est devenue une photographe estimée. Mais vingt ans après, un appel téléphonique de sa mère l’oblige à revenir à Alger pour assister à l’agonie de son père et tenter de tirer de prison son frère Mourad, accusé à juste titre de terrorisme.

Rachid Benhadj a lui aussi quitté l’Algérie, et, après des études artistiques à Paris, vit en Italie où il fait des films et enseigne le cinéma.

La photo du film est très belle. Mais le film, qui est une co-production algéro-italienne, n’est sorti dans aucun pays, hormis une présentation en avant-première algéroise le jeudi 11 octobre 2012. Il serait passé à la Cinémathèque en octobre 2013. On doit noter que, malheureusement, plus de la moitié du dialogue est en arabe, que les seuls sous-titres sont en italien, et qu’ils se surperposent sur des répliques en français !

En bref : serait à voir s’il passait quelque part, et s’il était sous-titré en français !Haut de la page

Une femme iranienne

Lundi 25 mai 2015

Réalisé par Negar Azarbayjani

Titre original : Aynehaye Rooberoo

Sorti au Canada (Festival de Montréal) le 6 septembre 2011

Sorti en France le 13 mai 2015

Le titre original signifie « Face au miroir », et le réalisateur de ce premier film est une réalisatrice.

Adineh appartient à une famille aisée de Téhéran. Orpheline de mère, elle est sous la coupe d’un père traditionnaliste et borné, qui veut la marier à son cousin. Or elle s’est toujours sentie comme un garçon, se fait appeler Eddie et désire changer de sexe. Elle pourrait le faire en Iran, l’un des rares pays où cette opération est légale et même subventionnée, mais elle souhaite surtout échapper à son père et partir pour l’Allemagne. Or elle va rencontrer une femme, Rana, qui est son contraire exact : pas riche, mère d’un petit garçon, mari en prison, faisant le taxi pour rembourser la dette de son mari. Les deux femmes deviennent amies, et Rana l’héberge momentanément et s’efforce de l’aider, jusqu’à plaider sa cause devant le terrible père, que rien ne peut faire plier – scène qui, soit dit en passant, sonne assez faux. En revanche, Amad, le frère aîné d’Adineh, change de point de vue, et il va favoriser la fuite de sa sœur.

Le film n’est pas parfait, certaines scènes gagneraient à être plus resserrées, mais son intérêt ne faiblit jamais, et les mauvaises critiques l’ayant accueilli et visant son caractère « pédagogique » sont très exagérées. L’actrice Shayesteh Irani, qui joue Adineh-Eddie, est vraiment excellente.

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San Andreas

Mercredi 27 mai 2015

Réalisé par Brad Peyton

Sorti au Royaume-Uni le 21 mai 2015

Sorti en France, en Belgique et à la Jamaïque le 27 mai 2015

Pourquoi, comme les snobs et les pisse-froid, bouder les films-catastrophes ? Parce qu’ils « font du spectacle » ? Et alors ? Hitchcock, DeMille et quelques autres (dont Kubrick) ont aussi fait du spectacle, et ce n’est pas déshonorant.

Et puis, il y a cette considération que je vous offre sans m’attendre à la trouver chez les critiques ayant pignon sur rue : les films-catastrophes ont ce point commun avec les comédies, qu’ils nous font frémir (ou rire, pour les comédies) avec les malheurs des autres. Or comédies et films-catastrophes n’ont pas la cote en France, contrairement à ce qui se passe en Grande-Bretagne, et ils ne sont jamais récompensés dans les festivals ! Ce qui, à mon sens, leur procure un intérêt supplémentaire...

Ce film-ci dépasse tout ce qu’on a fait précédemment, y compris 2012. Et comme le spectateur s’y attend, il n’y a pas de quoi fouetter un chat. Donc, dès la séquence d’ouverture (un accident d’auto spectaculaire, et un sauvetage admirablement filmé), on est dans le bain. Ce qui ne masque nullement le sujet du film, qui reste sous-jacent : comment prévoir les séismes, et que faire lorsque l’un d’eux s’annonce ? Pour quiconque a déjà vécu un séisme, ce qui est mon cas, c’est suffisamment passionnant pour qu’on passe sur un scénario fondé, comme toujours, sur les ennuis familiaux du héros, et sur le fait qu’on sait, d’avance, qu’à la fin tout va s’arranger. Mais c’est depuis toujours la règle du jeu, non ? Finalement, c’est beaucoup mieux que 2012, qui se terminait assez ridiculement (tous les survivants allaient se réfugier en Afrique, seul endroit du monde qui avait été épargné – faut bien une compensation à la pauvreté), et que le Tremblement de terre vu jadis, qui pêchait par le gadget sonore mis en avance à cette époque, le Sensurround.

Au passage, on n’oublie pas l’information scientifique : les célèbres degrés sur l’échelle de Richter sont de nature logarithmique, et cela signifie qu’un degré de plus indique une force dix fois plus intense. Et donc, passer de 7 à 9 implique une intensité cent fois plus grande.

Rappelons que la faille de San Andreas existe bel et bien, qu’elle partage en deux la Californie dans le sens nord-sud, qu’on estime qu’un séisme devrait normalement s’y produire une fois par siècle, et qu’il n’y a pas eu de tremblement de terre géant à cet endroit depuis... cent cinquante ans, à Fort-Tejon, en Californie du Sud ! Ce qui rend assez probable qu’il s’en produise un à brève échéance. Les plus importants relevés dernièrement ont eu lieu en 1857, en 1906, en 1989 et en 2004. Les magnitudes allaient de 6, pour le dernier, à 7,9 pour le premier.

Simple remarque : habituellement, les films hollywoodiens s’amusent à détruire New York ou la Maison-Blanche. Rien de tel cette fois, et seuls trinquent Los Angeles et San Francisco, plus un barrage du Nevada. On appréciera cette scène où un énorme porte-container en train de couler heurte le Golden Gate, et coupe en deux le pont le plus célèbre in the world. Il est aussi beaucoup question de la Tour Coit, à San Francisco, édifice extrêmement laid, et dont James Stewart, dans Vertigo, disait que sa seule utilité était de permettre à ses visiteurs de repérer facilement son appartement (il habitait au 900 Lombard Street).

(Aujourd’hui, à la toute première séance, nous n’étions que cinq spectateurs dans une salle de deux cents places)

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Irvin Yalom, la thérapie du bonheur

Vendredi 29 mai 2015

Réalisé par Sabine Gisiger

Titre original : Yalom’s cure

Sorti en Suisse (Festival de Locarno) le 9 août 2014

Sorti en France le 20 mai 2015

Portrait d’un professeur de psychiatrie retraité, commenté par lui, qu’on voit beaucoup. Puis viendront quelques membres de sa famille, et surtout sa femme Or, end épit de sa durée assez courte une heure et seize minutes), on s’ennuie profondément. Il faut dire que la psychiatrie n’en rien pour enthousiasmer.

Ne reste finalement que La chanson de Solveig, qui sonorise la longue séquence d’ouverture, et qui revient ensuite, en plus court. Mais à part cela, rien.

Jusqu’à quand des réalisateurs nous rendront-ils compte de leurs névroses passées en en faisant un film qui n’intéresse qu’eux ? L’effet cathartique dont parle la réalisatrice ne peut avoir d’effet sur des spectateurs non concernés.

En bref : inutile de se déranger.Haut de la page

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